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Une réunion entre trois chefs d'équipe assis sur des chaises colorées dans un bureau moderne.
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Tendances

4 choses à évaluer avant d’adopter la semaine de quatre jours

Passer à la semaine de travail de quatre jours soulève de nombreuses questions logistiques, du côté de la productivité et de la rémunération.

Une réunion entre trois chefs d'équipe assis sur des chaises colorées dans un bureau moderne.Une semaine de quatre jours améliorerait le bien-être et la productivité des employés. (Getty Images/Tom Werner)

Travaillez moins, travaillez mieux, voilà la promesse de la semaine de travail de quatre jours. Et le débat a été ravivé par la publication d’une étude islandaise, dont les constats appuient l’idée. De plus, la pandémie nous a obligés à adopter des modèles de travail hybrides, où la souplesse s’impose.

L’étude islandaise, qui entendait attester l’efficacité de la réduction du temps de travail et présenter de nouvelles preuves à l’appui, conclut que ce modèle plaît aux employés et aux employeurs, en réduisant le stress et les coûts.   

D’autres observateurs ajoutent qu’on va ainsi mieux concilier bien-être, économie et environnement, des axes à envisager ensemble, et non indépendamment. 

L’idée n’est pas nouvelle au Canada. La Fondation David Suzuki l’a mise en application dès les années 1990, et Expedibox, un fournisseur de casiers intelligents, offre une semaine réduite depuis sa fondation à Magog, au Québec, en 2017. 

Si l’idée vous sourit, voici les aspects que votre organisation devrait examiner.

1) MENER UNE ANALYSE PRÉALABLE 

Selon le CPA Marc Belaiche, président de l’agence de placement Torontojobs.ca, la faisabilité du projet dépend de la nature de l’entreprise et du secteur. « L’idée est séduisante, mais elle doit être nuancée. »

Sur le plan de la main-d’œuvre, tout dépend des paramètres : nombre d’équipes, horaire par quarts successifs ou horaire courant de 9 à 5, emplois à temps plein ou à temps partiel. Si la situation est complexe, le virage sera difficile à prendre, fait-il valoir. La formule ne sera pas non plus appliquée de la même façon dans le domaine de la fabrication, de la santé, des nouvelles technologies ou des services financiers. 

Par la suite, ajoute M. Belaiche, il faudra informer les employés des répercussions sur leur travail. Qu’est-ce qu’on attend d’eux pour garantir le succès de l’opération et quels changements seront apportés? Quel sera le degré de participation des employés dans la définition de la politique? Celle-ci sera-t-elle facultative ou obligatoire? Les employés seront-ils libres de faire ce qu’ils veulent de leur jour de congé supplémentaire, y compris accepter un travail d’appoint?

À Expedibox, la semaine de quatre jours convenait à un modèle d’affaires axé sur l’efficience, l’accélération et la rentabilité, explique le cofondateur, Alexandre Vignola-Côté. Et la semaine écourtée est plus facile à gérer dans une jeune entreprise qui compte moins de dix employés, ajoute-t-il.

2) ÉVALUER LES COÛTS

La semaine de quatre jours est rentable, soutiennent ses partisans.

Pour Sabaa Khan, directrice générale, Québec et Atlantique, à la Fondation David Suzuki – dont les employés travaillent 34 heures par semaine, du lundi au jeudi –, le bien-être du personnel se traduit en économies.

Grâce à la compression de la semaine, il y a moins de cas d’épuisement. Le nombre de jours de maladie baisse et le personnel s’absente moins, explique-t-elle. Et des employés reposés et moins stressés sont plus productifs

« Il s’agit de leur donner du temps pour récupérer et se ressourcer, explique-t-elle. On économise beaucoup en prenant soin de ses troupes. »

Des économies qui apportent aussi, par ricochet, des retombées environnementales, ajoute-t-elle. La consommation d’énergie et les émissions de GES diminuent, tout comme d’autres coûts d’infrastructure. 

Il reste que le passage à la semaine de quatre jours peut alourdir les coûts à long terme sur le plan des RH et de la paye, en particulier pour les petites entreprises, signale M. Belaiche. Il recommande de songer aux répercussions sur les vacances et la rémunération. On doit aussi penser à assurer le suivi du rendement des employés en fonction des heures travaillées. De plus, il faudra revoir les conditions de travail des employés à temps partiel et contractuels, compte tenu des modalités adoptées pour le personnel à temps plein.

3) REPENSER LA RÉMUNÉRATION

Avec la réduction du nombre d’heures vient tout naturellement la question de la rémunération. Comment seront calculés les salaires? Si le nombre d’heures diminue, la rémunération baissera-t-elle?

La réponse courte? C’est à chaque organisation de choisir. Les employés qui ont participé à l’étude islandaise, par exemple, ont conservé leur salaire. En revanche, l’équipe des RH qui a participé à un projet pilote d’Amazon travaillait 30 heures par semaine et touchait 75 % de la rémunération des employés à temps plein, tout en bénéficiant des mêmes avantages sociaux. D’autres employeurs, comme Killer Visual Strategies, de Seattle, ont comprimé la semaine en quatre journées de 10 heures.

Cela dit, des économistes craignent qu’un tel mouvement entraîne une baisse généralisée de la rémunération et de la productivité, pouvait-on lire récemment dans le Globe and Mail. De l’avis de M. Belaiche, le mouvement pourrait, à long terme, se répercuter sur les tarifs horaires, le droit aux congés payés et les autres avantages sociaux.   

Expedibox a choisi d’offrir un salaire horaire légèrement supérieur à la moyenne, explique M. Vignola-Côté, qui admet toutefois que certains candidats cherchent plutôt un emploi à 40 heures semaine qui paie davantage.   

4) DÉFINIR LE BUT DE L’OPÉRATION

Il est essentiel d’établir clairement la raison pour laquelle on adopte la semaine de quatre jours, ajoute M. Belaiche.

Pour la Fondation David Suzuki, la formule était conforme à sa mission – protéger la nature – tout en conciliant bien-être, productivité et viabilité financière, explique Mme Khan. La semaine de cinq jours, imaginée pour que les travailleurs en usine bénéficient de deux jours de repos, n’a été remise en question que récemment, à la faveur notamment de la pandémie, qui a amené les employés à réévaluer leurs méthodes de travail et leur mode de vie.

« La semaine de cinq jours semble aller de soi, mais elle ne favorise pas forcément le mieux-être, soutient-elle. Pour concilier les réalités de l’économie et les retombées environnementales, pour protéger la nature, la biodiversité, les écosystèmes, nous devons repenser le travail. C’est l’objectif de la semaine de quatre jours à la Fondation. Nous aspirons à réaliser des changements systémiques réels. »

AIGUISEZ VOTRE SENS DES AFFAIRES

Plus que jamais, en milieu de travail, la souplesse est de mise. Pour éviter la fuite de vos meilleurs employés, voici quelques conseils sur la marche à suivre pour fidéliser le personnel. Et si vous pensez à un retour au travail sur place, prenez soin d’évaluer les aspects juridiques quand vous remanierez les politiques en milieu de travail. 

Découvrez les facteurs ESG prioritaires pour les entreprises et les marchés financiers dans ce rapport de CPA Canada. Et consultez ces ressources sur la poursuite des activités en temps de crise, qui aideront votre organisation à surmonter la pandémie.