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Un homme en costume se tient debout avec un nuage devant le visage
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Magazine Pivot

Un nombre croissant de jeunes entreprises du secteur de la santé s’intéressent au cerveau

Anxiété, brouillard cérébral, troubles du sommeil : les maux aggravés par la pandémie stimulent l’innovation.

Un homme en costume se tient debout avec un nuage devant le visageSelon un récent sondage, 54 % des Canadiens ont observé une détérioration de leur santé mentale depuis le début de la pandémie. (Illustration Dan Parsons)

Votre mémoire vous joue des tours? Bienvenue au club! Comme certains scientifiques, dont Karl Szpunar, directeur général du Memory Lab de l’Université métropolitaine de Toronto (ancienne Université Ryerson), l'ont constaté, la pandémie a entraîné une multiplication des cas de « syndrome du cerveau embrumé ». Le surcroît de stress et les troubles du sommeil attribuables à la vie au temps de la COVID-19 seraient en cause, pense ce spécialiste de la mémoire. La prévalence de problèmes plus graves (épuisement professionnel, anxiété, dépression) est aussi en hausse. Selon un sondage Angus Reid, 54 % des Canadiens ont observé une détérioration de leur santé mentale depuis le début de la pandémie.

Mais à l’issue de cette période difficile à tous les égards pour la santé mentale, une vague de jeunes entreprises axées sur la stimulation du cerveau voient le jour, et offrent diverses formes de soulagement. Leur croissance en nombre et en variété ces 10 dernières années s’est accélérée pendant la pandémie.

Par exemple, la stimulation magnétique transcrânienne (SMT), une nouvelle technologie médicale, consiste à placer une bobine à proximité du cuir chevelu pour créer un champ magnétique à travers le crâne et stimuler les neurones sous-jacents. Selon Lisa Murray, ergothérapeute et copropriétaire de la clinique NeuroMed, à Edmonton, la SMT favorise la création de nouvelles connexions cérébrales et en élimine d’anciennes, devenues inutiles, induisant ainsi une plasticité du cerveau.

NeuroMed s’en sert surtout pour aider une clientèle qui souffre de dépression clinique – application étayée par le plus de données probantes. Les adeptes de la SMT soutiennent qu’elle pourrait soulager plus de la moitié des personnes chez qui les antidépresseurs sont inefficaces, avec rémission complète pour le tiers d’entre elles. (Le soulagement reste cependant temporaire; le traitement peut devoir être répété.) La clinique soigne aussi l’anxiété et offre la SMT à quiconque juge qu’elle pourrait lui être utile, notamment pour combattre les troubles mnésiques généraux.

Futuriste, la bobine de la SMT? En fait, la technologie est approuvée par Santé Canada depuis une dizaine d’années pour le traitement des troubles dépressifs majeurs. Outre la dépression et l’anxiété, on l’utilise pour soigner la douleur chronique et l’épuisement professionnel (défini par certains chercheurs comme une forme de dépression qui entrave la mémoire de travail, l’aptitude à faire des liens et la vivacité d’esprit), et même pour induire un possible avantage cognitif chez les sportifs de haut niveau.

Son usage gagne en popularité. La première clinique du genre à Edmonton, ouverte en 2017 par Lisa Murray et son mari, a rapidement fait des émules, dont des établissements publics comme l’Alberta Hospital Edmonton et les cliniques de santé mentale des Services de santé Alberta.

Pour le cabinet SharpBrains, spécialisé dans la recherche sur les applications de santé et de performance en neurosciences, la SMT s’inscrit dans le marché florissant des technologies de santé neurologique, avec la neurosurveillance (combinant surveillance cardiaque et stimulation cérébrale), les applications d’entraînement cérébral (comme Luminosity, qui stimule les fonctions cognitives par le jeu) et l’électroencéphalographie ou EEG (au moyen d’électrodes mesurant l’activité cérébrale). Dans ce sous-secteur du vaste marché de la « santé cérébrale » se côtoient une multitude de produits : méditation avec biofeedback, entraînement cognitif grand public, applications de sommeil éprouvées, suppléments pour la santé du cerveau, etc. (Pour un ordre de grandeur, d’après Grand View Research, le segment des suppléments pour le cerveau se chiffrait à 7,68 G$ US en 2021.)

La COVID-19 a perturbé le sommeil et l’humeur des gens, mais elle leur a aussi donné plus de temps libre pour essayer ces produits, ce qui a contribué à accélérer la croissance globale de longue date de ce marché, analyse Alvaro Fernandez, chef de la direction de SharpBrains.

La courbe de croissance semble toutefois s’aplatir. En cette troisième année de pandémie, et sous le spectre d’une récession, les nouvelles entreprises peinent à trouver du financement. « Un ralentissement s’annonce, cette année et l’an prochain », dit-il.

Les technologies souples prospéreront, prévoit-il. Des applications telles Breathe2Relax et HRV4Training, qui utilisent le biofeedback fourni par des capteurs intégrés aux téléphones intelligents, sont pensées d’emblée pour le grand public et sont plus évolutives que les technologies comme la SMT. Bien que prometteuses, cette dernière et ses semblables, dont la stimulation transcrânienne à courant direct (qui stimule le cerveau à l’aide d’un champ électrique plutôt que magnétique), « nécessitent une surveillance clinique pour assurer un ciblage adéquat ainsi qu’un suivi d’éventuels effets secondaires », poursuit-il.

Tout cela a un coût. Une séance de SMT se détaille habituellement dans les 300 $, et le traitement complet, dans les 6 000 $, au bas mot. Pour une dépression réfractaire aux anti­­dépresseurs, le jeu peut en valoir la chandelle. Pour de vagues inquiétudes épisodiques, pas vraiment.

BILAN DE SANTÉ

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