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Deux personnes regardant une tablette dans un bureau
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Magazine Pivot

Un nouvel outil (éventuel) pour stopper les flux financiers illicites

Le rapport Cullen suggère d’avoir recours aux ordonnances relatives à une richesse inexpliquée, lesquelles permettraient d’endiguer le flot d’argent sale.

Deux personnes regardant une tablette dans un bureauLes ordonnances relatives à une richesse inexpliquée contraignent les personnes soupçonnées de transférer des fonds d’origine douteuse à dévoiler la provenance de leur argent. (Getty Images/Morsa Images)

Dans la dernière des 101 recommandations de son rapport, la Commission Cullen approuve un concept novateur : l’« ordonnance relative à une richesse inexpliquée ». Il s’agit d’un outil prometteur qu’utilisent certains pays pour freiner l’accumulation de richesse par les criminels motivés par le profit, lit-on dans le rapport. Autre avantage : la mesure peut décourager les fonctionnaires étrangers corrompus et divers escrocs de transférer leur fortune illicite en Colombie-Britannique.

Le but d’une telle ordonnance est simple : contraindre une personne soupçonnée de dépenser ou de transférer des fonds d’origine douteuse à dévoiler la provenance de son argent. La mesure peut parfois mener à la confiscation de biens. Depuis le début de la guerre en Ukraine, des oligarques russes expatriés ont fait l’objet de telles ordonnances. Le Royaume-Uni a été parmi les premiers pays à légiférer pour autoriser les tribunaux à utiliser cette procédure contre de riches propriétaires soupçonnés d’avoir acquis des biens sans disposer d’une source de revenus manifeste.

La première personne visée par la nouvelle loi, Zamira Hajiyeva, épouse d’un banquier azerbaïdjanais emprisonné, a tenté de faire annuler l’ordonnance, mais elle a été déboutée en appel devant la Cour suprême en 2020.

Selon Jeffrey Simser, ancien avocat spécialiste de la lutte contre le blanchiment d’argent au gouvernement de l’Ontario, les ordonnances relatives à une richesse inexpliquée permettent d’accélérer les enquêtes et s’avèrent bien utiles là où les règles sur la propriété effective ne sont pas très strictes. « Comme l’a précisé le commissaire Cullen, les criminels sont futés, et ils ciblent les pays où la réglementation est plus laxiste. »

Pour certains juristes, ces ordonnances soulèvent toutefois des questions. Thomas Cromwell, ex-juge à la Cour suprême du Canada, a souligné devant la commission qu’aucun motif constitutionnel n’empêcherait la Colombie-Britannique d’inscrire l’ordonnance relative à une richesse inexpliquée dans sa loi sur la confiscation civile. Cependant, si la demande d’ordonnance vise à confisquer des biens qui pourraient servir à commettre un crime dans l’avenir, la province outrepasserait sa compétence.

« Des dispositions analogues à celles en vigueur au Royaume-Uni ne constitueraient pas une violation abusive d’un droit garanti par la Charte, conclut l’ex-juge, mais le recours à de tels pouvoirs risque de donner lieu à des contestations devant les tribunaux et de limiter dans une certaine mesure leur utilité. »

TOUJOURS AU COURANT

Plongez dans le rapport Cullen et découvrez l’incidence potentielle de ses recommandations. De plus, lisez notre entrevue avec l’expert anti-corruption José Hernandez sur ce que les CPA peuvent faire pour lutter contre la corruption et le blanchiment d’argent.