Vu la montée de l’IA, aux CPA de prendre les devants, selon Pamela Steer
Bientôt, le recours à l’IA ne sera plus un avantage concurrentiel, mais une pratique courante.
Si vous êtes de la génération qui a vécu l’arrivée de Lotus 1-2-3 et d’Excel, vous vous souviendrez du malaise pénétrant qui s’est alors installé. Les comptables s’interrogeaient. Leur profession allait-elle disparaître?
En définitive, de telles craintes n’étaient guère fondées, mais ces premiers bouleversements ont bel et bien transformé le métier. Dotés de nouveaux outils, nous avons gagné en efficience, libérés pour orienter nos prestations sur la réflexion stratégique, mise au service des clients et des employés.
Aujourd’hui, les CPA disent vivre enthousiasme et inquiétude devant des perturbations d’une tout autre envergure, la montée de l’intelligence artificielle (IA).
Selon le sondage CPA Canada Tendances conjoncturelles du printemps dernier, 62 % des répondants soulignaient que leur organisation n’utilisait pas l’IA au quotidien. Mais 45 % estimaient que d’ici cinq ans, la technologie libérerait le personnel des tâches routinières, et 36 % croyaient qu’elle déboucherait sur de nouvelles réalisations.
Contrairement à Lotus 1-2-3 et à Excel, ChatGPT, l’exemple le plus connu de nouvelle IA générative, est accessible à tous. La démocratisation d’un outil aussi puissant aura vite rehaussé les attentes des acteurs du milieu des affaires. Le recours à l’IA ne sera plus un avantage concurrentiel, mais une pratique courante.
Certes, l’IA devrait accélérer certaines tâches comptables, plus efficientes, plus faciles à personnaliser. Accès à des informations synthétisées, traitement rapide d’une masse de données, exhaustivité et exactitude des analyses sont au rang des atouts envisagés.
Par exemple, l’IA sert d’outil de détection des fraudes et d’évaluation des risques, par l’examen des tendances dans les jeux de données. Elle affine aussi l’exhaustivité et la justesse des prévisions, fondées sur l’analyse des données des exercices précédents, compte tenu de nouveaux types de renseignements, qui portent, entre autres, sur les enjeux climatiques et les tendances en approvisionnement.
Pour s’adapter et rester en tête, la profession doit voir l’IA comme un outil au service du savoir-faire de l’être l’humain, amené à s’acquitter avec brio de fonctions impossibles à confier à une machine aveugle.
L’automatisation de certains processus nous permettra d’aiguiser compétences et jugement, pour diriger d’une main sûre et favoriser la vigueur de l’économie.
Malgré tout, les outils d’IA présentent des risques inédits pour la profession, principalement par la remise en cause de l’intégrité et de la sécurité des données.
Or, la confiance reste au cœur de nos activités, tant pour l’auditeur, qui se prononce sur l’information, que pour le chef des finances, qui souhaite en assurer la fiabilité et la pertinence. Chaque CPA a donc un rôle clé à jouer.
Sur tous les continents, administrations publiques, entreprises et organismes intergouvernementaux visent l’élaboration d’un cadre de gouvernance qui régira l’ère de l’IA.
Forts de leur bagage en normalisation, les CPA pourront devenir les porte-étendards d’une approche équilibrée de la transformation numérique. Seront mis en balance les gains à court terme qu’amène l’automatisation, d’une part, et les objectifs stratégiques à long terme, d’autre part, pour protéger la résilience de l’entité, préserver la mémoire organisationnelle, et veiller à la réalisation de contrôles.
CPA Canada a représenté les détenteurs du titre canadien de CPA tant au fédéral que sur la scène internationale pour faire avancer résolument le débat sur l’innovation, marqué par le déferlement des données, de l’IA et des technologies.
En clair, une saine gouvernance des nouvelles technologies, qui nous permettra notamment d’assurer la qualité de l’audit au pays, repose sur une concertation nationale.
CPA Canada et le Conseil des normes d’audit et de certification (CNAC) ont établi le Groupe de travail sur l’audit des cryptoactifs, où le Conseil canadien sur la reddition de comptes (CCRC) et les CPA peuvent se prononcer sur l’application des Normes canadiennes d’audit (NCA) dans l’écosystème.
Les répercussions de l’IA, enjeu planétaire, varient d’un lieu à l’autre. La profession comptable canadienne doit en maîtriser les aspects réglementaires nationaux au même titre que les préoccupations propres à chaque administration. S’investir à l’échelle internationale, compte tenu des particularités du cadre local, c’est aussi parvenir à des solutions adaptées au contexte d’ici.
Ainsi, l’Ordre des CPA du Québec s’est prononcé sur le projet de loi provincial 64 (Loi 25) sur la protection des renseignements personnels, tandis que CPA Canada consulte ses membres afin de rédiger un mémoire sur le projet de loi fédéral C-27, qui touche des sujets connexes.
Pour agir dans l’intérêt public, il nous appartient de prendre position sur ce type d’enjeux phares, à l’échelle nationale et à l’échelle provinciale.
Nous vivons un moment décisif, à l’heure où l’évolution des technologies, des affaires et de l’économie, inextricablement mondialisées, nécessite une présence active du Canada à la table des nations.
Les CPA, garants de l’écosystème financier mondial et chefs de file en affaires, en normalisation et en gouvernance, doivent avoir voix au chapitre, pour orienter le plus grand virage technologique depuis l’arrivée d’Internet.
Différentes collaborations de CPA Canada à l’international en IA
- Avec l’AICPA, publications sur les technologies émergentes en Amérique du Nord : Introduction d’un CPA à l’IA, Audit axé sur les données : incidence de l’automatisation et de l’IA sur l’audit et le rôle de l’auditeur et La technologie de la chaîne de blocs et son incidence potentielle sur la profession d’auditeur et de certificateur.
- Avec l’ICAS, l’IFAC et l’IESBA, analyse de l’incidence de la complexité du milieu professionnel, des perturbations numériques ainsi que de la méconnaissance des faits et de la désinformation sur la primauté des compétences et du leadership éthique.
- Avec l’IFAC (groupe consultatif du Comité des professionnels comptables en entreprise), élaboration d’indications sur la gouvernance et la chaîne de valeur des données, et sur le rôle changeant des CPA.
- Réponse à la consultation de l’Organisation internationale des commissions de valeurs sur l’IA et l’apprentissage machine (chefs d’entreprise, investisseurs, auditeurs, autorités de réglementation, universitaires et experts en technologie financière ou en recherche sur l’IA du Canada ont participé).
Merci de nous avoir fait parvenir vos commentaires et questions sur l’avenir d’une profession unie depuis que l’Ordre des CPA du Québec et CPA Ontario ont annoncé leur intention de se retirer de l’Accord de collaboration. Nous vous tiendrons au courant des développements à l’égard des enjeux de gouvernance. Sur notre site, cpacanada.ca, vous trouverez une FAQ mise à jour à mesure.
EN SAVOIR PLUS SUR L’IA
Consultez les ressources technologiques de CPA Canada sur les incidences de l’automatisation et de l’IA concernant le rôle des CPA. Écoutez le balado de la série Voir demain sur l’incidence de l’IA en comptabilité et découvrez pourquoi il est important d’adopter une approche de l’IA responsable et centrée sur l’humain. Enfin, découvrez comment mettre en œuvre une gouvernance des données et des TI efficace.