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« C’est maintenant qu’il faut prendre des mesures urgentes et ambitieuses. »

Catherine Stewart, ambassadrice du Canada pour les changements climatiques, nous parle des engagements clés de notre pays et des mesures prises pour atteindre nos objectifs.

La 28e conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28) s’est tenue aux Émirats arabes unis (ÉAU) du 30 novembre au 12 décembre 2023. Aujourd’hui, Catherine Stewart, ambassadrice du Canada pour les changements climatiques, fait le point sur les mesures et les engagements clés du Canada dans cette sphère. Objectifs ambitieux (tripler les capacités d’énergies renouvelables), soutien financier aux pays vulnérables, démarches concertées : le Canada a un rôle capital à jouer pour combattre les changements climatiques, rôle qui fait intervenir les CPA.

CPA CANADA : Pouvez-vous nous donner un aperçu des mesures et des engagements clés pris par le Canada à la suite de la COP28?
Catherine Stewart (CS) :
À la COP28, le Canada et près de 200 autres pays ont conclu un accord historique sur le bilan mondial. Cet accord invite à adopter une démarche collective sans précédent pour accélérer la transition vers les énergies propres : tripler les capacités d’énergies renouvelables, doubler l’efficacité énergétique et abandonner progressivement les combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques afin d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050.

En outre, le Canada a milité pour le maintien de l’engagement à éliminer progressivement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles et à accélérer l’adoption des technologies de réduction des émissions, dont le captage, l’utilisation et le stockage du carbone. Nous aurions aimé un engagement plus rigoureux à l’égard des centrales au charbon, mais nous n’avons pas fini d’insister sur ce dossier. Le charbon reste la plus importante source d’émissions de CO2 à l’échelle mondiale.

De plus, le Canada continue de faire valoir l’importance d’engagements accrus en matière de financement de la lutte contre les changements climatiques afin de soutenir les efforts mondiaux d’atténuation et d’adaptation. Ainsi, le ministre Steven Guilbeault coanime, avec son homologue égyptienne, les discussions concernant les moyens de mise en œuvre.

Le Canada s’est tout aussi fermement appliqué à souligner l’importance de protéger la nature pour lutter contre la crise climatique. Un an après la tenue de la 15e conférence des parties à la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique (COP15) en sol canadien, le Canada et des pays partenaires ont fait reconnaître, dans le bilan de la COP28, que les mesures relatives au climat et à la biodiversité visaient des objectifs qui se renforcent mutuellement.

Portrait de Catherine StewartCatherine Stewart est l’ambassadrice du Canada pour les changements climatiques. (Photo fournie)

CPA CANADA : Quelles sont les prochaines étapes nécessaires à la concrétisation des engagements pris à la COP28?
CS :
La COP28 et le consensus atteint aux ÉAU ont marqué une étape importante afin de garder le cap sur l’objectif de l’Accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C. Il incombe désormais à tous les pays, en particulier aux grands émetteurs, d’agir. Le prochain grand jalon selon la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) consistera, pour les parties, à mettre à jour et à soumettre en 2025 de nouvelles contributions déterminées au niveau national (CDN), qui définiront une cible de réduction des émissions pour 2035 en fonction des engagements pris, notamment à Dubaï.

Les pays en développement, surtout les plus pauvres et les plus vulnérables, auront encore besoin de soutien pour lutter contre les changements climatiques. À cet égard, le Canada fait figure de leader dans le cadre de son engagement de 5,3 G$ au titre du financement international climatique. Notre pays s’efforcera aussi de faire adopter cette année un nouvel objectif chiffré collectif de financement de l’action climatique pour l’après-2025, qui répondra mieux aux besoins et aux priorités des pays en développement. Cet objectif devra permettre d’envisager le soutien financier dans le sens le plus large.

Par exemple, il doit mobiliser les contributeurs traditionnels, mais aussi cerner des façons de mieux tirer parti des capitaux privés. Le Canada entend aussi venir en aide aux pays les plus vulnérables au moyen du fonds mondial pour les pertes et dommages liés à la crise climatique, et nous continuerons d’apporter notre soutien dans l’opérationnalisation de ce fonds et d’encourager les contributions de toutes sources.

CPA CANADA : Comment faire en sorte que ces promesses se traduisent en mesures concrètes dans l’atteinte des objectifs climatiques mondiaux?
CS :
Il faudra désormais prendre des mesures concrètes d’adaptation. À Dubaï, nous avons convenu d’un cadre pour l’objectif mondial en matière d’adaptation afin de renforcer les efforts à ce chapitre, entre autres par l’adoption de cibles sectorielles globales (résilience des réseaux d’eau, d’alimentation, de santé) pour 2030 et au-delà. Les pays devront se doter d’un plan pour atteindre ces cibles et mettre en place des systèmes de contrôle et de mesure des progrès réalisés.

Au pays, la Stratégie nationale d’adaptation du Canada tient compte des vulnérabilités, des besoins et des capacités de divers groupes. Elle repose également sur un ensemble de principes directeurs servant à éclairer la prise de mesures d’adaptation justes, équitables et inclusives. À l’échelle internationale, le Canada continue de soutenir les efforts d’adaptation grâce à sa contribution au financement de la lutte contre les changements climatiques, dont au moins 40 % vise à favoriser la capacité d’adaptation et la résilience des pays en développement.

Ce qui importe surtout, c’est que les pays collaborent étroitement, apprennent les uns des autres et s’entretiennent franchement de la réalité qui nous touche tous. Pour sa part, le Canada continuera de promouvoir la protection du climat dans les différents espaces de discussion, notamment auprès du G20 et du G7.

Mais nous savons que cela ne suffit pas : notre pays fait face à la triple crise des changements climatiques, de la perte de biodiversité et de la pollution, et c’est maintenant qu’il faut prendre des mesures urgentes et ambitieuses. Il sera essentiel de conjuguer nos efforts pour réagir à cette crise et d’en accélérer le rythme.

CPA CANADA : La controverse entourant le texte de l’accord, qui appelle à une « transition vers une sortie des combustibles fossiles » au lieu d’une « élimination graduelle », a beaucoup retenu l’attention. Selon vous, comment traduira-t-on cet engagement en mesures concrètes et réalisables?
CS :
En 2023, le Canada s’est engagé, avec des partenaires du G7, à accélérer l’élimination graduelle des combustibles fossiles sans dispositif d’atténuation en vue d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050.

La Régie de l’énergie du Canada et l’Agence internationale de l’énergie soulignent que même si cette ambition se réalise, le pétrole et le gaz naturel feront encore partie de l’équation énergétique, mais leur recours devra faire l’objet de dispositifs d’atténuation et se limiter à des applications sans combustion. Elles ajoutent que l’essor d’autres formes d’énergie propre et renouvelable comprimera grandement la demande et, par conséquent, la production mondiale de pétrole et de gaz naturel.

Au pays, on met en place une série de mesures afin de s’attaquer aux émissions dans le secteur pétrolier et gazier, tout en créant de bons emplois pour la classe moyenne. Il y a entre autres la tarification du carbone, l’adoption de projets de règlements visant à réduire d’au moins 75 % les émissions de méthane dans le secteur, et l’adoption d’un cadre pour le plafonnement de ses émissions. Le Canada est aussi le premier pays du G20 à publier un guide analytique rigoureux en réponse à son engagement à éliminer graduellement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles. Par ailleurs, nous avons mis fin en 2022 au soutien public relatif aux combustibles fossiles sans dispositif d’atténuation à l’échelle internationale, et nous prévoyons cette année d’éliminer graduellement le financement public de ce secteur.

CPA CANADA : Quelle est l’importance des mesures incitatives dans l’atteinte des objectifs du Canada en matière de lutte contre les changements climatiques?
CS :
Au Canada, on observe régulièrement les répercussions directes des changements climatiques, qu’il s’agisse de températures extrêmes, de tempêtes violentes et fréquentes, ou de phénomènes météorologiques causant des inondations, des sécheresses et des feux de forêt. Sans compter que notre pays se réchauffe deux fois plus rapidement que le reste du monde, voire trois fois plus dans le Nord, ce qui menace les moyens de subsistance, les cultures et les traditions. Nous sommes conscients de l’importance d’une collaboration et de mesures ambitieuses pour lutter contre les changements climatiques à l’échelle mondiale.

Pour ce faire, nous devons employer tous les outils à notre disposition. Le Plan de réduction des émissions pour 2030 est la feuille de route qui définit, secteur par secteur, la voie à suivre pour réduire les émissions de 40 % au-dessous des niveaux de 2005 d’ici 2030 et atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Il souligne les mesures ambitieuses et immédiates prises par le Canada pour réduire les gaz à effet de serre afin de combattre les changements climatiques, tout en renforçant notre économie par des emplois durables et une croissance industrielle respectueuse de l’environnement. On y prévoit enfin plus de 140 mesures de protection du climat sur lesquelles nous travaillons avec nos partenaires (provinces, territoires et organisations autochtones nationales) et de nouveaux investissements de 9,1 G$, notamment en programmes incitatifs.

Le Canada a publié récemment son premier rapport d’étape sur le Plan de réduction des émissions pour 2030, qui explique comment nous dissocions croissance économique et émissions. Dans le secteur du transport, par exemple, de plus en plus de particuliers et d’entreprises optent pour des véhicules à émission zéro et profitent ainsi de programmes incitatifs et de coûts d’utilisation et d’entretien moindres. Les cinq véhicules à émission zéro les plus vendus ont tous une autonomie de plus de 400 kilomètres, et les prix diminuent à mesure que se multiplient les marques et modèles disponibles.

CPA CANADA : Dans le contexte des normes internationales d’information sur la durabilité, comment les CPA peuvent-ils contribuer à la lutte contre les changements climatiques? Plus précisément, comment ces normes pourront-elles améliorer la qualité de l’information fournie en lien avec les changements climatiques et atténuer le risque d’écoblanchiment?
CS :
L’information financière relative aux changements climatiques, un élément clé de la finance durable, est essentielle à la prise en compte du risque associé aux changements climatiques sur les marchés des capitaux. Plus nombreuse et de meilleure qualité, l’information financière relative aux changements climatiques offre une vision plus rigoureuse de la résilience climatique ainsi que des risques et des possibilités, ce qui favorise une prise de décisions plus éclairées en matière d’investissement, de crédit et de souscription d’assurances.

Les marchés, les prêteurs, les assureurs, les investisseurs, les décideurs et les citoyens ont besoin d’une information normalisée au sujet des risques et des possibilités liés aux changements climatiques auxquels les organisations sont confrontées, pour s’assurer que les actifs sont évalués correctement en fonction de ces risques. La présentation d’une information normalisée permet aussi d’atténuer le risque d’écoblanchiment.

Ces dernières années, nous en sommes venus à reconnaître l’importance de la normalisation de l’information sur les risques financiers relatifs aux changements climatiques. En 2017, le Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GTIFCC) a défini un cadre pour aider les entreprises à communiquer plus efficacement ces risques aux investisseurs, aux prêteurs, aux assureurs et aux autres parties prenantes.

Le gouvernement du Canada a annoncé son soutien au cadre volontaire du GTIFCC dans son budget de 2019; depuis, il a instauré la présentation obligatoire de l’information financière relative aux changements climatiques, conformément aux recommandations du Groupe de travail, pour les institutions financières et les sociétés d’État sous réglementation fédérale.

En 2023, le Conseil des normes internationales d’information sur la durabilité a publié ses normes d’information sur la durabilité et les changements climatiques. Ces normes, fondées sur les travaux du GTIFCC, ont été approuvées par l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV), dont les autorités de réglementation membres supervisent 95 % des marchés financiers du monde.

Comme il a été annoncé dans l’Énoncé économique de l’automne de 2023, le gouvernement entreprendra aussi les prochaines étapes afin d’élaborer une taxonomie qui soit conforme à l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050. Ces mesures contribueront à atténuer les risques d’écoblanchiment en permettant de déterminer avec une plus grande certitude si les activités économiques s’inscrivent dans un plan de transition crédible et fondé sur la science.

COMPTABILITÉ ET CHANGEMENTS CLIMATIQUES

CPA Canada est un chef de file dans l’intégration de la durabilité aux saines pratiques de gestion. Découvrez ces ressources en gestion des émissions et renseignez-vous sur le programme de certificat en information sur la durabilité et les questions ESG. Regardez la vidéo du Symposium sur les facteurs ESG, qui reviendra en juin prochain et qui permet d’accumuler des heures de formation continue.

Enfin, lisez le rapport sur l’engagement du Canada à atteindre la carboneutralité d’ici 2050, et découvrez le rôle déterminant que joueront les CPA dans la transition.

Légende : Les pays devront se doter d’un plan pour atteindre des cibles climatiques et mettre en place des systèmes de contrôle et de mesure des progrès réalisés. (Getty Images)