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Canada
Économie

Pouvons-nous gagner la guerre commerciale avec les États-Unis en achetant canadien?

La population canadienne prend les choses en main, espérant stimuler l’économie, mais peut-être en vain.

Quand la Maison-Blanche a annoncé l’imposition de tarifs douaniers sur des produits fabriqués au Canada, des citoyens de ce côté-ci de la frontière ont décidé d’agir. Le mouvement #achetercanadien est né, incitant les consommateurs à privilégier l’achat de produits canadiens en signe de solidarité et dans l’espoir de stimuler l’économie.

Des Canadiens ont annulé leurs vacances aux États-Unis et rempli leurs paniers de produits d’épicerie locaux. Un Ontarien de 17 ans a même choisi de consacrer ses vacances d’été à recenser une liste de produits fabriqués chez nous.

« C’est une réaction compréhensible : la Maison-Blanche a imposé des obstacles tarifaires tout à fait injustifiés sur l’acier et l’aluminium, a menacé de faire de même dans le secteur automobile et a adopté une approche très offensive dans la renégociation de l’ALENA », résume Brett House, vice-président et économiste en chef adjoint à la Banque Scotia.

Pourtant, les analystes doutent de l’influence réelle du mouvement sur l’économie. M. House estime que cette riposte risque même de faire monter les prix au Canada, étant donné la forte dépendance du pays aux échanges commerciaux.

« Dans bien des domaines, nous n’avons aucune solution de rechange locale, et en créer exigerait des investissements substantiels, fait-il remarquer. Le temps que ces investissements portent des fruits et se traduisent en capacité de production, la querelle commerciale avec les États-Unis sera de l’histoire ancienne. »

Selon les prévisions de base, ajoute M. House, les négociations sur l’ALENA avec les États-Unis pourraient vraisemblablement se conclure sur une note positive. En attendant, mieux vaut garder son calme et poursuivre les activités commerciales.

Évoquant un mouvement Acheter canadien du passé, David Jacks, professeur d’économie à l’Université Simon Fraser, rappelle les tarifs douaniers Smoot-Hawley de 1930, imposés par les États-Unis sur des centaines de produits importés. Le Canada avait alors répliqué en appliquant lui-même des droits de douane, ce qui s’était révélé très peu efficace sur le plan économique.

« Les données historiques ne sont pas vraiment encourageantes, fait observer M. Jacks. Je pense que ce mouvement n’aura que des effets négligeables sur le contexte macroéconomique canadien, et c’est encore plus vrai du côté des États-Unis. »

Par ailleurs, il est difficile d’éviter totalement les produits américains, car les chaînes d’approvisionnement sont souvent transcontinentales. M. Jacks cite comme parfait exemple le iPhone, « produit américain par excellence de notre époque ».

« Le iPhone n’est même pas fabriqué aux États-Unis, mais il n’est pas non plus entièrement fabriqué en Chine, explique-t-il. La Chine n’est que la dernière étape d’une longue chaîne d’approvisionnement touchant des milliers de pièces fabriquées par des centaines de fournisseurs dans des dizaines de pays. Je vois mal comment boycotter Apple pourrait être une réponse efficace, puisque ses activités commerciales ont lieu en grande partie hors des États-Unis. »

Malgré tout, il n’est jamais mauvais pour les consommateurs de réfléchir consciemment à la portée de leur pouvoir d’achat, souligne M. House. Ils sont ainsi obligés de penser non seulement au pays d’origine des produits, mais aussi à la durabilité de l’environnement et aux normes de fabrication.

En somme, préserver l’ouverture des marchés et les échanges commerciaux mondiaux aidera l’économie à poursuivre son évolution dans la bonne direction.

« Si nous continuons de rendre le Canada intéressant pour les investisseurs, les fabricants et les immigrants qualifiés, nous finirons par nous en sortir plutôt bien », conclut M. House

Pour en savoir plus

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