Une employee parle avec une collègue au bureau
Tendances

Rémunération : les priorités des jeunes loin d’être seulement financières

Le salaire de base n’est qu’un facteur parmi d’autres pour la nouvelle génération.

Une employee parle avec une collègue au bureauPour certains, la souplesse est la priorité absolue; d’autres misent plutôt sur des valeurs communes, les possibilités d’avancement ou d’autres facteurs. (Shutterstock/ Fizkes)

En matière de rémunération, la jeune génération a ses propres priorités. Dans certains cas, ce sont les avantages sociaux sur mesure et un régime de récompenses adapté aux intérêts et au mode de vie de la personne qui font pencher la balance. Pour d’autres, c’est le perfectionnement professionnel qui s’avère déterminant, ou encore l’adéquation entre les valeurs personnelles et celles de l’organisation. Et parfois, tous ces facteurs jouent!

« Les travailleurs des jeunes générations ne forment pas un bloc homogène », rappelle Michael Kravshik, CPA, chef de la direction et cofondateur de LumiQ, une plateforme de balados de perfectionnement professionnel en finances et en comptabilité. L’âge moyen des membres de l’équipe dont il est responsable se situe entre 25 et 29 ans. « Certains s’épanouissent dans un cadre structuré et d’autres, dans un contexte bien plus dynamique où ils ont beaucoup de latitude. »

Quoi qu’il en soit, Michael Kravshik dégage un constat général : les membres de cette génération pensent à ce qu’ils vont apprendre, à leur avancement, à la flexibilité et à l’équilibre travail-vie personnelle. « En entrevue, il n’est presque jamais question d’assurances ni de comptes de retraite. Les arrangements hybrides sont très recherchés, mais la vie sociale et les relations amicales au bureau comptent aussi pour beaucoup. »

LES CONSTATS DES ENQUÊTES

Deloitte a récemment publié les résultats de son enquête mondiale sur les opinions des employés membres des générations Y et Z au sujet des divers éléments qui influencent leurs décisions professionnelles.

« Les aspects financiers, l’équilibre travail-vie personnelle, la santé mentale et l’action pour le climat sont prioritaires », énumère Carolyn Hamer, associée et leader nationale, Transformation de la main-d’œuvre, chez Deloitte Canada (et invitée du troisième épisode des balados de CPA Canada Tout sur la gestion des finances, intitulé Décoder la rémunération – au-delà des chiffres). « Du côté des finances, la question du coût de la vie figure en tête de liste. Ne s’arrêtant pas aux chiffres, les candidats recherchent une formule globale : occasions de perfectionnement et nouveaux programmes de formation, appui à la famille, souplesse quant au lieu et aux méthodes de travail, et soutien en santé mentale. »

Robert Half Canada arrive à des conclusions semblables à la suite d’une étude récente. « L’argent demeure le premier critère, comme pour toute autre génération, surtout dans un contexte inflationniste », constate Cal Jungwirth, directeur des services de placement permanent, Finance et comptabilité, chez Robert Half Canada. « La génération Z veut aussi le meilleur des deux mondes : la souplesse de choisir où et quand on travaille, l’appui de gestionnaires inspirants et un environnement riche en apprentissages. »

L’IMPORTANCE DES VALEURS

Carolyn Hamer voit que les plus jeunes recrues, au-delà des questions de rémunération et de flexibilité, veulent également connaître les grands principes qui animent l’organisation. « Ils posent des questions sur les mesures prises pour mettre en œuvre la mission de l’entité et accordent plus d’importance à l’harmonisation avec leurs propres intérêts. »

« Les Z cherchent des entreprises qui partagent leurs valeurs », confirme Jennifer Mazzarolo, présidente, Maverick Consulting Group. « Pour eux, un emploi n’est pas “juste un boulot”. »

Ainsi, ils n’hésitent pas à interroger les organisations sur leur objectif et leur mission pour jauger la compatibilité avec ce qui compte à leurs yeux, précise-t-elle. « Ils veulent savoir à quel point l’entreprise s’implique dans la collectivité, si ses activités de bienfaisance leur conviennent. Ils scrutent aussi le secteur, le bilan en matière des droits de la personne et l’empreinte carbone bien plus que ne le faisaient les générations précédentes. »

Emily Nesbitt, CPA, responsable de la formation technique à LumiQ, travaille pour l’entreprise depuis 2021. Elle a fait ses premiers pas dans le groupe de l’audit d’EY, en 2015.

« Je me suis rendu compte que mon but à long terme n’était pas de devenir associée dans un cabinet comptable. Je voulais mettre mon expérience au service d’une entité en croissance et choisir une entreprise dont les objectifs et la mission me parlaient. Mon travail à LumiQ a l’avantage de faire appel à plus de créativité qu’un poste traditionnel en comptabilité. »

Sa nouvelle mission lui permet de proposer des solutions à valeur ajoutée. « J’aime savoir que j’amène un changement positif aux parties prenantes et à mes clients. »

L’ATTRAIT DE L’AVANCEMENT

Le soutien en matière d’avancement professionnel est également une grande priorité pour les jeunes, poursuit Jennifer Mazzarolo. « Se détournant parfois des cheminements plus classiques, les membres de la génération Z recherchent des programmes ou des formations internes pour perfectionner diverses compétences : habiletés de présentation, résolution de conflits, leadership, réseautage, etc. »

Les candidats s’intéressent à des avantages comme le remboursement des frais de formation, les programmes de formation interne et le mentorat, ajoute-t-elle. « Ils se renseignent sur les programmes de l’employeur, sur la possibilité de faire financer leur MBA, sur les mesures concrètes prises par le passé pour soutenir le perfectionnement professionnel des employés… »

Pour ce qui est des entreprises en démarrage, « certains candidats estiment qu’un régime d’actionnariat est plus rentable, même conjugué à un salaire plus bas », explique Jennifer Mazzarolo.

D’aucuns préfèrent la rigueur et la structure associées à un grand cabinet, tandis que d’autres choisissent des entités de moindre envergure pour aiguiser sans attendre leurs compétences en leadership, précise Michael Kravshik. « Après trois ans au sein de notre entreprise, certains de nos collègues sont en mesure de décrocher un poste qu’ils ne pourraient obtenir qu’au terme d’une dizaine d’années dans une boîte plus traditionnelle. C’est ainsi dans une petite société. On fait plus de choses, on est exposé à une plus grande variété de dossiers, on acquiert plus de compétences au quotidien. »

Amanda Fanning, CPA, directrice des services de certification chez MNP, a cherché dès l’obtention de son diplôme un milieu qui mise sur la souplesse et qui permet d’avancer rapidement. Entrée en fonction dans ce cabinet il y a trois ans, elle a déjà été nommée directrice, ce qu’elle n’aurait pas pu obtenir avant d’avoir investi cinq bonnes années dans une plus grande structure.

« Dans un petit cabinet, on m’a confié un rôle important plus vite. Dès ma première année chez MNP, j’étais responsable des dossiers de certains clients. Maintenant, je me tourne vers l’aspect innovation et technologies grâce à plusieurs projets. C’est nouveau, et très stimulant. »

LES DISCUSSIONS AVEC L’EMPLOYEUR

« Lorsqu’on évalue un employeur potentiel, il est essentiel de bien comprendre ses propres priorités, mentionne Cal Jungwirth. En effet, comme les régimes de rémunération sont maintenant très individualisés, il faut cerner ce qui compte le plus pour nous, et l’énoncer clairement pendant l’entrevue. »

« Le salaire de base n’est plus le facteur décisionnel déterminant en matière d’emploi. Les gens évaluent tous les autres aspects, résume Jennifer Mazzarolo. Je les encourage à analyser la rémunération globale : congés, régimes de retraite, cotisations de l’employeur, remboursement des frais de formation, options sur actions… »

« Les personnes qui cherchent un emploi ont devant elles de belles perspectives : c’est l’occasion de penser à de toutes nouvelles voies, où que l’on se situe dans son cheminement professionnel », conclut Carolyn Hamer. « Les organisations, quant à elles, se laissent également guider par une vision plus ouverte, et plus créative, pour répondre à leurs besoins. »

LES DIFFÉRENCES ENTRE LES GÉNÉRATIONS : DES PISTES DE RÉFLEXION

Pour approfondir la question des générations et de la rémunération, écoutez le troisième épisode des balados de CPA Canada Tout sur la gestion des finances, intitulé Décoder la rémunération – au-delà des chiffres. Vous trouverez également d’autres pistes de réflexion dans les publications suivantes : « Oui, on est différents », disent les X et les Y, qui exposent deux visions contrastées des finances; Fossé générationnel : les jeunes ont-ils plus de mal à s’enrichir?; et Survivre et prospérer : Aller de l’avant financièrement après une perte d’emploi.