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Des snacks sont éparpillés sur une table couverte de tacos
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Magazine Pivot

Des collations savoureuses pour lutter contre la sécheresse

Les conditions météorologiques difficiles obligent les entreprises alimentaires à réfléchir à la meilleure façon d’utiliser les ressources limitées à leur disposition.

Des snacks sont éparpillés sur une table couverte de tacosL’entreprise Nemi propose des collations à base de nopal, un cactus. (Avec l’autorisation de Nemi)

Depuis quelques années, les cultures pâtissent grandement de la sécheresse en Europe et aux États-Unis, tandis que la croissance démographique fait pression sur les réserves mondiales d’eau douce, nécessaire à l’agriculture. Ces conditions forcent l’ensemble de l’industrie alimentaire, du producteur jusqu’au détaillant, à optimiser les ressources limitées dont elle dispose. Le contexte amène aussi une offre nouvelle sur le marché : des collations à base d’ingrédients dont les cultures résistent bien à la sécheresse.

« Les entreprises alimentaires voient que les mauvaises conditions météorologiques peuvent miner leur approvisionnement en ingrédients agricoles, et, par ricochet, leur capacité de répondre à la demande des consommateurs », explique John Cranfield, professeur d’agroéconomie au Département d’économie alimentaire, agricole et des ressources à l’Université de Guelph.

Le blé, le sorgho, l’orge, le soja ainsi que les graines de moutarde et de tournesol, entre autres, résistent bien à la sécheresse. On les retrouve donc de plus en plus souvent dans des collations ordinaires. Par exemple, Fresh Bellies fabrique des grignotines santé à base de sorgho, semblables aux Cheetos. Selon la fondatrice, Saskia Sorrosa, l’entreprise est l’une des premières à fabriquer des produits végétaliens sans OGM à partir de cette « supercéréale » écologique.

Pour sa part, Nemi propose des collations à base de nopal, un cactus essentiel pour la cuisine mexicaine appelé aussi figue de Barbarie. À son arrivée aux États-Unis, la fondatrice, Regina Trillo, a été déçue par le choix offert dans la section des produits exotiques en épicerie. « Les produits soi-disant mexicains n’étaient pas authentiques », explique-t-elle au magazine The Spoon.

Nemi a donc créé des aliments authentiques qui sont bons au goût et bons pour la planète.

L’entreprise s’approvisionne en nopal auprès de producteurs indépendants de l’État d’Aguascalientes, au Mexique. En règle générale, on peut faire sauter, frire ou même rôtir les « raquettes » du cactus. Nemi les sèche au soleil avant de les moudre, puis mélange la poudre avec d’autres ingrédients (chia, amarante, curcuma, protéines de pois) pour en faire des bâtonnets fins et croustillants de différentes saveurs, dont chili-curcuma, chipotle fumé et churro.

Selon John Cranfield, les agriculteurs qui cherchent à adapter leurs systèmes de production aux sécheresses récentes craignent non seulement pour le rendement de leurs exploitations dans l’immédiat, mais aussi pour la viabilité à long terme de leur ferme.

« Ils pensent à leurs profits actuels, mais aussi à ceux sur un horizon de quatre ou cinq ans, ainsi qu’à la fertilité et au rendement des terres qu’ils légueront aux prochaines générations. »

Ainsi, les agriculteurs sont souvent les premiers défenseurs du développement durable. Parallèlement, un nombre croissant de consommateurs prennent leurs décisions d’achat en fonction de l’environnement, et leurs choix façonnent l’offre.

« Les détaillants ne misent pas sur des produits pour lesquels il n’y a pas d’acheteurs », poursuit John Cranfield. « Leur but n’est pas de changer les habitudes des consommateurs, mais bien de suivre un mécanisme de marché naturel. Bref, ils s’adaptent à une clientèle qui recherche des produits certifiés ou déclarés conformes à des méthodes de production durable. »

Simon Somogyi, titulaire de la chaire Arrell de commerce de l’alimentation à l’Université de Guelph, estime que les entreprises ont un intérêt commercial à se pencher sur ces habitudes de consommation durable. « Bien qu’il s’agisse d’une minorité par rapport à l’ensemble du marché, certains consommateurs sont prêts à payer plus cher pour un produit durable sur le plan environnemental ou social. »

Devant la multiplication des événements météorologiques extrêmes, l’épuisement des ressources naturelles et le manque de collaboration des industries ou entreprises qui ont le plus contribué à la crise climatique, on peut comprendre pourquoi les collations à base d’ingrédients résistants à la sécheresse sont vues comme un palliatif, un choix à la mode, et non comme une véritable solution à long terme.

« Certains de ces produits relèvent du stratagème marketing, ajoute Simon Somogyi. En effet, il y a bien longtemps qu’on a créé des variétés de céréales et d’oléagineux conçues pour mieux résister à la sécheresse. Certaines entreprises ne font que promouvoir des ingrédients qui ne sont pas tout à fait nouveaux ni novateurs. »

Stratagème marketing ou solution valable? Quoi qu’il en soit, John Cranfield est catégorique : le virage durable est désormais une tendance bien ancrée dans l’industrie alimentaire, et à mesure que la crise climatique s’aggravera, d’autres marques opteront probablement pour cette voie.

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