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Groupe de personnes assises en rang et applaudissant
Comptabilité
La profession

La santé mentale, une réelle priorité dans votre organisation ?

Des experts expliquent comment instaurer une culture de travail axée sur la santé et le bien-être.

Groupe de personnes assises en rang et applaudissantLe bonheur et la santé sont gages d’efficacité au travail. (Getty Images/ Pixelfit)

De plus en plus d’employeurs s’efforcent d’améliorer leurs programmes d’aide et leurs politiques en santé mentale. Outre les avantages que cette approche procure sur le plan de la santé et du bien-être du personnel, le fait d’investir dans une culture qui encourage le dialogue et facilite l’accès aux ressources est bon pour les affaires.

« Un employé qui ne va pas bien est un employé qui n’est pas productif. Le bonheur et la santé sont gages d’efficacité au travail, affirme Denis Trottier, FCPA, premier responsable de la promotion de la santé mentale à KPMG Canada. Et l’investissement – parce que oui, il y en a un – en vaut le coût dès la première année. »

Rayhan Hossain abonde dans le même sens. « Dans les environnements où la santé mentale est une priorité, le taux de roulement, les pertes de temps et le nombre de blessures et d’accidents sont moindres, selon le psychothérapeute accrédité de l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM), section de Toronto. Parallèlement, le moral, la productivité, la créativité et la loyauté s’en trouvent améliorés. »

Les employeurs ont fait de grands progrès dans l’élaboration de programmes d’aide aux employés et à leur famille, et dans la gestion du changement. Il n’en demeure pas moins que d’après les experts interrogés, il reste encore beaucoup à faire. Voyez leur perspective sur la façon dont les employeurs peuvent instaurer une culture favorisant la santé mentale.

AMÉLIORER L’ACCÈS AUX RESSOURCES

« Beaucoup d’employeurs se contentent de mettre sur leur site Web des liens vers des outils, comme un cours sur la résilience ou des techniques de méditation, et de dire aux membres de leur personnel de s’y référer », explique Merridee Bujaki, FCPA, professeure titulaire en comptabilité à l’École de gestion Sprott et coresponsable du volet d’études de cas comptables au Healthy Professional Work Partnership.

Or, bien souvent, les employés ont du mal à s’y retrouver, souligne Denis Trottier. « Je demande toujours à mes clients de faire eux-mêmes l’exercice, de trouver les ressources en santé mentale sur leur site. S’il faut plus de deux clics, la personne en difficulté risque d’abandonner. Ces ressources doivent se trouver à la page d’accueil. »

Il suggère aux employeurs de mettre en évidence, sur leur site Web, les ressources externes gratuites. « Par exemple, Retrouver son entrain est un programme d’aide gratuit destiné aux personnes de 15 ans ou plus de partout au pays. Le site Movember.com propose des outils intéressants, tout comme Jack.org. Enfin, l’appli de thérapie virtuelle MindBeacon donne accès à un large éventail de services en santé mentale. »

Dans un monde axé sur l’équité, les employeurs doivent aussi veiller à ce que les membres de leur personnel puissent accéder à des services qui ne leur créent aucun inconfort, ajoute-t-il.

DONNER LA PRIORITÉ À LA FORMATION

« La formation en santé mentale devrait faire partie des cours offerts aux cadres et gestionnaires de personnel, au même titre que ceux en secourisme, poursuit Denis Trottier. Et il n’est pas nécessaire de concevoir ces cours à l’interne. Par exemple, l’ACSM et la Commission de la santé mentale du Canada proposent des ateliers partout au pays. Tous les principaux fournisseurs d’avantages sociaux en organisent aussi, alors informez-vous auprès du vôtre. »

PRÊCHER PAR L’EXEMPLE

Eileen Chadnick, directrice de Big Cheese Coaching, souligne qu’au sortir de la pandémie, certains de ses clients se sont employés, d’entrée de jeu, à encourager les gens à s’exprimer librement, que ce soit dans des rencontres individuelles ou en équipe. « Le sentiment de solidarité peut être très motivant. Expliquez à vos équipiers qu’ils peuvent venir vous voir s’ils ont besoin de parler. »

Il est tout aussi essentiel de prêcher par l’exemple, précise Denis Trottier. « On ne peut pas convier uniquement le personnel, et non les cadres, aux ateliers en santé mentale. C’est comme dire que le problème ne peut venir que d’en bas. »

Les gestionnaires doivent eux aussi prendre soin de leur santé mentale, souligne la directrice de Big Cheese Coaching. « Si vous souffrez d’épuisement professionnel, vous ne pourrez rien faire de bon. Il vous faut l’énergie nécessaire pour être un bon leader. »

Elle conseille également aux cadres qui ont une dure journée de ne pas hésiter à le dire. « L’authenticité n’a pas son pareil. Lorsque vos équipiers voient que vous êtes comme eux, ils se sentent à l’aise de venir vers vous pour chercher de l’aide. »

INSTAURER UNE CULTURE QUI FAVORISE UNE BONNE SANTÉ MENTALE

« À défaut d’avoir une culture qui favorise vraiment la santé mentale, vous n’avez qu’un engagement théorique dans ce domaine », fait valoir Denis Trottier.

Il est important d’instaurer une culture où les gens peuvent parler de santé mentale sans craindre de vivre de la discrimination ou du harcèlement, ajoute le psychothérapeute. « Montrez-leur qu’ils peuvent s’ouvrir à vous en toute confiance. En agissant en prévention de la sorte, vous pourriez éviter qu’une personne vive plus tard des problèmes de santé mentale ou de la détresse psychologique. »

Les employeurs peuvent s’y prendre de différentes façons pour mieux promouvoir le soutien en santé mentale, fait observer Denis Trottier. « Ça peut être aussi simple que d’inclure le sujet à l’ordre du jour de vos réunions avec le personnel. Offrez un espace où les gens sentent qu’ils peuvent parler librement de leurs problèmes. Invitez des conférenciers qui servent la culture de votre organisation. Travaillez à faire de la santé mentale une partie Intégrante de votre culture, au moyen de diverses stratégies tout au long de l’année. »

ÉTABLIR DES POLITIQUES D’ACCOMMODEMENT ET DE RÉINTÉGRATION

Denis Trottier estime que les organisations pourraient se montrer plus accommodantes envers les employés aux prises avec un problème de santé mentale. « Il faut réfléchir à la façon d’offrir un soutien plus efficace. Et ce ne sont pas les moyens qui manquent : on peut par exemple dispenser la personne des interactions avec les clients ou lui demander d’aider ses collègues dans l’analyse de dossiers et de rapports. »

Cet accommodement peut prendre une forme structurée ou être informel, précise Rayhan Hossain. « Il peut s’agir d’exempter la personne des réunions où sa présence n’est pas exigée, ou de lui donner la possibilité d’effectuer certaines tâches seule. L’idée, c’est de lui donner de la latitude de sorte qu’elle puisse se concentrer sur son apport et sur ses forces. »

FIXER DES LIMITES

Eileen Chadnick discute souvent avec ses clients de la nécessité de fixer des limites en ce qui a trait aux courriels. « Les dirigeants ne sont pas toujours conscients des effets que les courriels envoyés la fin de semaine ou en soirée peuvent avoir sur le bien-être du destinataire. Les bons leaders rédigent leurs courriels au moment qui leur convient, mais les envoient seulement pendant les heures de travail. Un geste tout simple, mais tellement bénéfique. »

Elle ajoute qu’il faut éviter autant que possible de fixer des échéances inopinément. « Souvent, les dirigeants qui accusent du retard dans un dossier imposent aux autres de courts délais sans prévenir. Organisez au mieux votre travail de manière à éviter de tels imprévus. Permettez aux gens de libérer leur esprit et leur emploi du temps. Vous constaterez la différence. »

Par ailleurs, les employeurs doivent encourager les employés à prendre soin de leur santé mentale. Rayhan Hossain recommande de prendre des mesures simples, comme veiller à la prise des pauses-repas et des vacances et, au besoin, de congés visant à se refaire une santé.

Commencer les réunions par un exercice de respiration ou un échange informel (sur les mets ou les passe-temps préférés des participants, par exemple) est aussi un bon moyen de tisser des liens et de créer un sentiment d’appartenance.

« Les employeurs doivent également trouver un juste équilibre entre les attentes envers les employés et les ressources à leur disposition, poursuit le psychothérapeute. Quand on exige d’une personne plus que ce qu’elle est capable de faire, c’est souvent là que la détresse se présente. »

Et Eileen Chadnick d’ajouter que le manque de clarté dans les tâches attribuées est un autre facteur. « Ça peut semer la confusion, causer du stress et éroder la résilience. »

POURSUIVRE SUR VOTRE LANCÉE

Dernier conseil de la directrice : se garder de tenir pour acquis que les gens qui ne viennent pas se confier vont bien. « Beaucoup de gens cachent leur souffrance. Les cadres doivent entretenir un dialogue permanent avec les membres de leur équipe pour savoir comment ils vont, que ce soit par rapport à la charge de travail ou de manière générale. Ils ont peut-être besoin de plus de temps, d’un coup de main ou d’un autre type de soutien. »

« Il ne suffit pas de dire que la santé mentale de votre personnel vous tient à cœur, conclut Rayhan Hossain. Les dirigeants ont un rôle crucial à jouer : ils doivent être conscients de l’importance de leur propre santé mentale, prendre des mesures pour favoriser la santé mentale, et créer un milieu de travail où la santé mentale et le bien-être général sont une priorité. »

FAVORISER LA SANTÉ MENTALE AU SEIN DE VOTRE ORGANISATION

Apprenez-en plus sur les facteurs de stress courants chez les comptables et découvrez pourquoi il est impératif de considérer la santé mentale non seulement comme un problème de ressources humaines, mais aussi comme un enjeu organisationnel. Enfin, voyez le parcours de Denis Trottier en santé mentale, jusqu’à ses fonctions de défenseur du mieux-être du personnel.