Des CPA noirs prodiguent de précieux conseils aux jeunes qui débutent

Savoir communiquer, faire preuve de leadership et nouer des relations font partie des compétences générales à maîtriser pour une carrière de CPA réussie. (Getty Images/Thomas Barwick)

Sans compétences générales, difficile de montrer l’étendue de ses compétences techniques. Un constat encore plus vrai quand on est issu de la diversité, ont constaté Leonidas Assogba et Andrea Nicholls, deux CPA qui ont des années d’expérience derrière eux. Ces compétences dites douces peuvent même faire toute la différence.

Andrea Nicholls, CPA, est chef des finances de Dentons Canada. Elle habite à Montréal.

CPA CANADA : Quelles compétences générales les nouveaux CPA devraient-ils privilégier? 

Andrea Nicholls :
Tout jeune CPA, peu importe sa couleur de peau, doit impérativement posséder trois compétences générales. Premièrement, savoir bien communiquer, avec ses collègues comme avec toute personne avec qui il est en relation, à l’écrit comme à l’oral. Il est essentiel de pouvoir parler chiffres avec des gens qui ne sont pas des spécialistes. Ensuite, savoir collaborer, notamment avec les personnes qui ne font pas partie de nos proches collaborateurs. Et enfin, savoir établir des relations à l’interne comme à l’externe. Plus vite on maîtrise ces compétences, plus vite on en profite professionnellement.

Ce qui change pour un CPA noir? Ces compétences l’aideront encore plus à trouver un parrain, un mentor ou à bâtir un réseau de contacts, autant de personnes à qui il pourra parler, qui le conseilleront, le guideront professionnellement et défendront ses intérêts.

La façon dont nous travaillons a changé. Puisqu’on ne peut plus voir nos collègues au bureau comme avant, il faut redoubler d’efforts pour établir ces contacts. Il doit y avoir une vraie intention – il ne faut pas hésiter à proposer de faire un Zoom, sans ordre du jour, juste pour discuter, ou à proposer d’aller boire un café. 

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Les médias sociaux peuvent être utiles pour le réseautage, car nos futures relations peuvent avoir des profils très divers et être n’importe où, y compris dans des groupes communautaires. Il faut faire preuve d’une grande ouverture d’esprit et accepter que ces démarches prennent du temps, même quand on a eu une journée chargée.

Un autre grand défi pour les CPA noirs est d’entrer dans une salle de réunion et de ne jamais voir personne qui leur ressemble. On subit instantanément beaucoup de pression. Voilà pourquoi vous ne devez pas hésiter à partager votre expérience, y compris avec des personnes qui ne vous ressemblent pas, pour exprimer ce que vous ressentez quand vous êtes ainsi isolé.Vous susciterez ainsi plus d’empathie, de compréhension.

Pour un jeune CPA noir, ce manque de diversité dans certaines organisations rend la recherche d’un parrain ou d’un mentor plus difficile, mais aussi plus pertinente que jamais. On a besoin d’être accompagné. 

Enfin, il faut veiller à être perçu comme une personne ouverte, en apprentissage continu, qui se montre curieuse du monde de la comptabilité mais aussi de l’économie ou de la politique, par exemple, en dehors des murs de son organisation. Ça finit par faire toute la différence. 

Leonidas Assogba, CPA, est Conseiller principal au Vice-Président risques opérationnels, au Mouvement Desjardins, à Montréal*. 

CPA CANADA : Pourquoi pensez-vous que les compétences non techniques sont une des clés du succès?

Leonidas Assogba :
L’avancement professionnel repose en partie sur le développement de compétences générales comme le leadership et la communication. Celles-ci aident à s’intégrer dans une organisation et à jouer un rôle stratégique. 

Il est crucial de pouvoir partager ses idées dans un langage clair et compréhensible pour les non-CPA, de développer une approche client et un sens des affaires, surtout que de nombreux CPA évolueront dans plusieurs domaines au fil de leur carrière. 

Je conseillerais d’ailleurs de ne pas s’arrêter au titre de CPA, mais de faire une spécialisation (gestion des risques TI, cybersécurité, acquisition et fusion d’entreprises…). Pour les jeunes qui font partie d’une minorité, ça permet de se différencier et ça offre des opportunités.   

J’ai moi-même largement développé ces compétences en dehors de mon travail. Par exemple, depuis trois ans, je fais du mentorat avec Academos (j’en ai longtemps fait avant de façon informelle avec des gens issus de la diversité). Je fais aussi partie du Black Wealth Club, un regroupement canadien de professionnels noirs. 

Plus on comprend tôt les bénéfices du réseautage, mieux on gravit les échelons. On l’oublie parfois à nos débuts, parce qu’on veut surtout faire ses preuves.

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Parfois, on a l’impression d’être seul à vivre certains défis. Cette perception est pourtant partagée par de nombreux Noirs, d’où l’importance d’être solidaire, surtout que les défis ne manquent pas.

Par exemple, les professionnels noirs sont victimes d’un biais de sous-performance très répandu selon lequel ils ne seraient pas aussi qualifiés que leurs homologues blancs. Évidemment, c’est faux, mais ça peut être décourageant.

Quand on franchit certains caps professionnels, on réalise aussi qu’on est parfois le seul professionnel noir à ce niveau. On croit alors devoir travailler encore plus pour prouver qu’on est à la hauteur. 

Dans les faits, les gens issus de la diversité ont eu à franchir tant de barrières qu’ils sont toujours très professionnels, prêts à faire mentir les stéréotypes. Ambitieux, ils ont développé une grande résilience, et appris à faire preuve d’intelligence émotionnelle et d’empathie.

Je le dis souvent aux jeunes : tous ces biais et clichés existent, ils ne disparaîtront pas. Le plus important, c’est de travailler fort et de montrer qu’on est capable d’atteindre ses objectifs. En adoptant cet état d’esprit, la carrière suivra. 

* L’article a été mis à jour le 20 décembre 2022 afin de tenir compte du nouveau du poste occupé par Léonidas Assogba.