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Deux collègues regardent un écran d’ordinateur
Articles de fond
Magazine Pivot

Repenser la mission des organisations

Gord Beal, FCPA, vice-président, Recherche, orientation et soutien à CPA Canada, souligne que les CPA jouent un rôle essentiel pour aider l’entreprise à se faire citoyenne.

Deux collègues regardent un écran d’ordinateurEn s’appuyant sur la transparence et la reddition de comptes, les CPA guideront la transition vers un nouvel engagement envers le bien commun. (Getty Images/Morso Images)

Étonnant mais vrai, l’entreprise n’a pas toujours été centrée sur les profits.

Certaines des premières sociétés par actions, établies au XVIIe siècle, se caractérisaient par leur vocation sociale, au-delà d’une visée marchande. On pense, par exemple, à la construction d’un hospice. L’établissement d’une structure visait à limiter la responsabilité des actionnaires et à protéger l’entreprise contre les créanciers. Si de telles entités réalisaient des bénéfices, ce n’était pas leur seule raison d’être.

C’est au fil du temps que la quête d’une expansion soutenue, assise de la marge bénéficiaire et du rendement attendu par les actionnaires, allait devenir le but essentiel à poursuivre. Ce recadrage a amené les sociétés par actions à s’engager dans une voie résolument différente.

Toutefois, le vent a tourné, et on observe un retour en force de l’entreprise citoyenne. Si bien que, dans la mouvance d’une tendance appelée à se confirmer, les CPA joueront un rôle déterminant.

L’émergence des marchés financiers où se négocient des valeurs a probablement été le principal moteur de la quête du profit. Sous l’effet de ces forces externes, la mobilisation de capitaux et la hausse du cours des actions sont devenues les indicateurs à surveiller pour attester le succès.

À en croire certains économistes, la création de la Ford Motor Company, en 1903, a marqué une étape. Henry Ford, conscient des enjeux socio-économiques, entendait verser à ses ouvriers un salaire décent : de quoi s’offrir une maison, une voiture (et pourquoi pas deux, aurait-il déclaré, du jamais vu à l’époque). Il faisait donc place au bien commun, à la prospérité au sens large. Mais les membres du conseil d’administration de Ford, estimant que de tels objectifs ne cadraient pas avec leur mandat, à savoir l’optimisation des profits et de la valeur actionnariale, allaient s’opposer à sa vision. Ils seront victorieux.

Bien des décisions centrées sur la rentabilité s’inscrivent, par définition, dans le court terme. Or, pour connaître une croissance confirmée et une réussite soutenue, souvent, le renoncement aux gains immédiats s’impose.

Dorénavant, les chefs d’entreprise redéfinissent les contours du succès, et créer de la plus-value pour les actionnaires ne suffit plus à leurs yeux. La haute direction et les investisseurs en prennent conscience, les vrais chefs de file pensent au contexte social où évoluent clients, fournisseurs et employés. Tous doivent s’y épanouir, sans quoi l’entreprise, qui doit porter son regard au-delà de la quête du bénéfice, ne survivra pas.

Et ce n’est qu’une pièce du casse-tête. En coulisses, dans le monde des affaires, une forme de démocratisation, de prise de conscience s’opère, et on se préoccupe d’enjeux tels les changements climatiques, les inégalités sociales et les droits de la personne.

Le principe de la vocation sociale, hier marginal, fait couler beaucoup d’encre, et voilà que les actionnaires, à l’instar des employés, demandent des comptes à l’entreprise. Les investisseurs la poussent à définir sa mission sociale, conscients que la démarche favorise la valeur à long terme. Même les investisseurs institutionnels comme les caisses de retraite, dont l’horizon s’étend sur 60 ou 70 ans, reconnaissent que c’est le modèle citoyen qui sera gage de rendements probants.

Préconiser une gouvernance d’entreprise où la responsabilité sociale prime, c’est poser des gestes réfléchis. Et le mouvement s’accompagne aussi de répercussions tangibles. Dès que la mission sociale s’enchâsse dans son mandat, l’organisation commence à revoir ses décisions d’investissement, dans la continuité de sa nouvelle vocation.

Nombre d’investisseurs et de cadres en sont convaincus, les organisations citoyennes seront plus aptes à réussir. Elles créeront de la valeur, et le capital qui y sera placé fructifiera. Le nouvel engagement envers le bien commun, qui l’emporte sur le profit, constitue une tactique de survie. Se transformer pour triompher et non périr.

En s’appuyant sur la transparence et la reddition de comptes, les CPA guideront cette transition.

Prenons l’exemple des innombrables entreprises qui s’engagent à lutter contre les changements climatiques et visent la carboneutralité. Leur chef de la direction fait valoir leurs efforts, mais, en pratique, ont-elles vraiment les moyens et les ressources internes pour agir? Ont-elles dressé un plan concret?

Voilà pourquoi il faut sans tarder mesurer les progrès vers la carboneutralité et en faire état. Ce sont les CPA qui poseront les jalons pour permettre aux investisseurs d’évaluer les résultats obtenus par rapport aux objectifs, et ce sont eux qui veilleront à ce que les dirigeants respectent leurs engagements.

Pour les CPA, endosser ce rôle fondamental, c’est aussi agir afin de continuer à attirer des jeunes vers la profession. Il faut donc aller au-delà des chiffres et de la rentabilité. Comme la finalité des entreprises, la finalité du travail des CPA évolue.

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