Pénurie mondiale de micropuces : une incidence tangible sur l’économie canadienne
La pénurie de micropuces qui sévit sur les marchés mondiaux force le Canada à revoir son modèle d’approvisionnement. (Bloomberg)
La pénurie mondiale de semi-conducteurs a occasionné des retards de production au Canada : automobiles, jouets, appareils électroniques, réfrigérateurs, tout y passe. Et dire qu’un si petit circuit fait la pluie et le beau temps!
Hélas, ces inconvénients ne s’atténueront pas de sitôt. Selon un sondage des fabricants de matériel électronique, 60 % d’entre eux s’attendent à ce que la disette se prolonge jusqu’en 2022, voire au-delà. Pat Gelsinger, chef de la direction d’Intel, émettait ce pronostic l’été dernier : « L’offre et la demande ne retrouveront l’équilibre qu’en 2023. Dans de nombreux secteurs, la situation pourrait même empirer. »
Comment en sommes-nous arrivés là? Plusieurs facteurs sont en cause : confinements, instabilité géopolitique, demande accrue en électronique et simple malchance.
D’abord, en 2019, les États-Unis, protectionnistes, ont imposé des restrictions pour limiter la vente de composants technologiques (puces y compris) à certaines entreprises chinoises. Celles-ci ont répliqué en constituant des stocks de semi-conducteurs.
Puis, les premiers confinements et l’incertitude économique ont incité certains clients à cesser leurs commandes. Par exemple, la fermeture temporaire des usines des constructeurs automobiles nord-américains, en mars 2020, a entraîné une chute de la demande.
Les fabricants de puces ont donc trouvé d’autres débouchés, si bien que, quand le secteur automobile a repris de la vitesse, les stocks étaient épuisés. Comme le souligne Gaurav Gupta, analyste chez Gartner, dans un rapport d’Accenture de 2021, c’est là où le bât blesse. Le sort d’une voiture de 30 000 $ dépend d’un circuit imprimé qui ne vaut que quelques cents.
La demande d’appareils électroniques, notamment pour les bureaux à domicile, a augmenté en raison de la pandémie, tandis que les chaînes d’approvisionnement connaissaient un ralentissement. Les fabricants chinois, qui contrôlent environ 10 % du marché mondial des semi-conducteurs, ont manqué de conteneurs d’expédition, d’où une réduction de l’offre.
De surcroît, la malchance a frappé. En mars 2021, une vingtaine de machines ont été détruites par un incendie dans une usine japonaise qui produisait près du tiers des puces utilisées par les constructeurs automobiles du monde entier. Un mois plus tôt, des pannes de courant causées par une vague de froid au Texas avaient forcé Samsung, Infineon Technologies et NXP Semiconductor à interrompre la fabrication de puces.
Aux États-Unis, l’administration Biden a mis sur pied un groupe de travail pour redonner un nouvel élan aux chaînes d’approvisionnement ralenties et accélérer la cadence dans les usines de fabrication de puces.
Chez nous, le Canada’s Semiconductor Council, établi en mai 2021, exhorte les Canadiens à repenser leur modèle d’approvisionnement et à prendre des mesures afin que le pays devienne un chef de file dans le domaine des semi-conducteurs.
Toutefois, selon un porte-parole du conseil, les difficultés d’accès au capital de risque constituent l’un des plus grands obstacles. Les capacités du Canada, plutôt limitées, se concentrent dans une poignée de créneaux. Le conseil prévoit publier bientôt une stratégie et un plan d’action à l’échelle nationale.
« Le Canada doit faire un choix : saisir cette occasion ou opter pour le statu quo, une position de plus en plus intenable », fait valoir Melissa Chee, présidente et chef de la direction de ventureLAB, un carrefour technologique torontois, et vice-présidente du Canada’s Semiconductor Council. « Dans le secteur hautement concurrentiel et névralgique des semi-conducteurs, nous devons nous montrer audacieux et nous tailler une place au sommet. »
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