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Une chef de bureau tenant une réunion avec son équipe
Lutte contre le blanchiment d’argent

Lutte contre le blanchiment d’argent : de nouvelles mesures à connaître

Le Canada devrait disposer d’un registre national de propriété effective d’ici 2023 et s’est engagé à créer une agence de lutte spécialisée. Voyez pourquoi les CPA doivent se préparer.

Une chef de bureau tenant une réunion avec son équipePlus que jamais, les comptables doivent savoir avec qui ils font affaire et pouvoir transmettre des informations quand ils sont au courant de certaines transactions. (Tom Werner/Getty Images)

Le Canada met à jour son régime de lutte contre le blanchiment d’argent depuis quelques années. Plusieurs modifications législatives sont déjà entrées en vigueur en 2020 et en 2021.

Dans son dernier budget, le gouvernement fédéral a intensifié ses efforts en annonçant la mise en place dès 2023, soit deux ans plus tôt que prévu, d’un registre public et consultable de propriété effective. Il a aussi annoncé la création d’une agence de lutte contre la criminalité financière.

Voici ce que vous devez savoir des nouvelles annonces et comment vous préparer. (Pour connaître les exigences qui s’appliquent aux CPA, consultez également le Guide de conformité à la législation canadienne sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes publié par CPA Canada en 2022.)

UN REGISTRE NATIONAL

Une des mesures fortes qui contribuera à répondre aux recommandations du Groupe d’action financière (GAFI) en matière de lutte contre le blanchiment d’argent est la création d’un registre de renseignements sur la propriété effective des sociétés régies par la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Ces sociétés sont déjà obligées depuis 2019 à la tenue d’un registre des particuliers qui ont « un contrôle important ».

Un bémol : par défaut, les sociétés créées en vertu de lois provinciales, qui représentent la grande majorité des entreprises au Canada, ne feront pas partie de ce registre. « Les provinces et les territoires participeront sur une base volontaire; on espère qu’ils le feront, explique Michele Wood-Tweel, FCPA, CPA, vice-présidente, Affaires réglementaires, à CPA Canada. Cela dit, toutes et tous n’en sont pas au même stade, ce qui pourrait compliquer pendant plusieurs années encore la tâche des CPA qui doivent obtenir ces informations. »

Malgré tout, ce registre devrait grandement améliorer la transparence en matière de propriété effective au Canada, ce qui permettra à celui-ci d’emboîter le pas à plusieurs pays où des mesures similaires ont déjà adoptées.

UNE AGENCE CENTRALE

L’engagement du gouvernement à créer une agence de lutte contre la criminalité financière est aussi une bonne nouvelle, selon Marc Tassé, expert en crimes financiers. « En agissant comme point central pour les différentes activités de lutte, cette agence devrait permettre de mieux coordonner les efforts et d’améliorer le partage d’informations entre agences. »

Même si ses pouvoirs législatifs précis restent à déterminer, cette agence devrait être en mesure de mieux affronter les défis que représentent les crimes financiers complexes et en évolution rapide, qu’ils soient d’origine nationale ou internationale.

UNE MENACE CHANGEANTE

« Les risques liés au blanchiment d’argent ont considérablement changé, confirme Michele Wood-Tweel. On ne peut plus s’en tenir aux mêmes exigences qu’il a y 20 ans. Le régime doit tenir compte d’éléments comme les monnaies virtuelles et le sociofinancement, dont les transactions pourraient devoir être signalées au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières (CANAFE). »

La cybercriminalité dans le monde a aussi augmenté, surtout depuis la pandémie, ce qui signifie qu’il y a davantage d’argent à blanchir. Or, « les criminels rechercheront toujours les maillons les plus faibles pour agir, ces endroits qui permettent à des entités juridiques de cacher des activités illégales grâce à un manque de transparence », poursuit Michele Wood-Tweel.

Les sanctions économiques imposées à la Russie par de nombreux pays, dont le Canada, créent aussi de nouveaux risques de blanchiment d’argent. « Des personnes et des organisations touchées par les sanctions depuis l’invasion de l’Ukraine pourraient essayer de les contourner en mettant leur argent ou leurs actifs à l’abri dans des pays où les mesures de lutte contre le blanchiment d’argent sont les moins contraignantes. »

DES MOYENS LÉGISLATIFS ET FINANCIERS

Le gouvernement fédéral est également en train d’élaborer des modifications législatives afin, notamment, de renforcer la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, le Code criminel et d’autres lois pour accroître la capacité des autorités de détecter les crimes financiers, d’enquêter sur ceux-ci et d’intenter des poursuites.

Dans le budget de 2022, le gouvernement propose également de verser 89,9 M$ sur cinq ans et 8,8 M$ par la suite pour appuyer le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), l’unité du renseignement financier du pays.

« Face à une menace changeante, le Canada renforce son régime, comme de nombreux autres pays, constate Michele Wood-Tweel. Il n’a pas toujours été une cible privilégiée des blanchisseurs d’argent, mais la situation a changé, comme ailleurs dans le monde, et il doit agir. Les CPA sont bien placés pour participer à la lutte sur différents fronts. »

COMMENT LES CPA PEUVENT-ILS SE PRÉPARER?

Il y a plusieurs façons de se préparer aux mesures déjà en vigueur et aux changements annoncés dans le budget.

S’informer. « Vous devrez peut-être modifier vos politiques, vos processus et votre programme de conformité, et vous assurer que vos employés soient formés pour obtenir les renseignements nécessaires, explique Michele Wood-Tweel. Par exemple, si des CPA exercent des activités visées par la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et qu’ils ont des motifs raisonnables de soupçonner que l’opération effectuée constitue du blanchiment d’argent, ils doivent le signaler à CANAFE, et ce, plus rapidement qu’ils ne l’auraient fait avant. »

Connaître son client. Plus que jamais, les CPA participant à certaines opérations visées par la LRPCFAT doivent savoir avec qui ils font affaire. « S’ils traitent avec des personnes qui occupent par exemple des postes politiques publics au Canada ou à l’étranger, ou qui œuvrent dans des directions d’organisations internationales, les mêmes obligations s’appliquent en raison des nouvelles exigences », poursuit Michele Wood-Tweel.

Opter pour la vigilance. Facilitateurs, prête-noms, fiduciaires… Les intermédiaires peuvent être variés dans une transaction frauduleuse. « Comme CPA, vous n’avez pas le droit de vous associer à une information que vous savez fausse, alors posez des questions, insiste Marc Tassé. Et si vous découvrez que votre client n’est pas celui qui détient vraiment l’actif, ne le présentez pas comme un actif de cette personne ou de cette entreprise-là. »

Faire preuve d’éthique. Les CPA doivent se conformer à leur code de déontologie. Voilà pourquoi tous les CPA ont besoin d’une formation en déontologie, pour avoir les compétences éthiques nécessaires pour faire face à divers dilemmes. »

TOUT SAVOIR SUR VOS OBLIGATIONS

Reportez-vous à la nouvelle version du guide sur la lutte contre le blanchiment d’argent pour connaître les nouvelles règles et leur incidence les CPA.

CPA Canada vous propose aussi de nombreuses ressources sur des sujets variés, comme les risques de non-conformité, les règles sur la connaissance du client ainsi que la tenue de documents et la déclaration à CANAFE.

Par ailleurs, voyez où en est le Canada dans son travail d’adaptation aux recommandations du GAFI; suivez les derniers développements grâce à notre webinaire sur le sujet.

Pour en savoir plus sur les sanctions imposées à la Russie, consultez la page « Que signifient les crises mondiales pour les CPA du Canada? »