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Gros plan des mains d'un homme d'affaires afro-américain en position de mudra, se détendre et méditer au bureau dans un bureau
Comptabilité
Durabilité

Peut-on chiffrer l’incidence d’un programme de bien-être psychologique au travail?

Deux équipes du secteur des finances ont relevé le défi de la « comptabilité du capital social et humain », dans leur entreprise respective, pour montrer qu’une bonne santé mentale chez le personnel est une bonne chose pour les affaires.

Gros plan des mains d'un homme d'affaires afro-américain en position de mudra, se détendre et méditer au bureau dans un bureau« Les maladies mentales sont en hausse », mentionne Pamela Steer, FCPA, FCA, qui était jusqu’à tout récemment à la barre des finances de la WSIB (elle est aussi membre du Réseau de leadership des chefs des finances). « Pour être un ambassadeur [des pratiques exemplaires auprès des employeurs], nous jugions important, comme organisme, d’être un chef de file des initiatives en santé mentale. »

Pour qu’une entreprise soit prospère, au XXIe siècle, elle doit se soucier de la santé mentale de son personnel.

Les problèmes de santé mentale (ou santé psychologique) chez la population active du pays ont coûté plus de 6 G$ en perte de productivité aux employeurs, en 2011, selon la Commission de la santé mentale du Canada. La productivité est en effet mise à mal par l’absentéisme, le présentéisme et un taux de rotation plus élevé. [Voir La santé mentale de vos employés, faites-en votre affaire dès aujourd’hui.]

Il semble que les programmes axés sur le soutien d’une bonne santé mentale chez les employés soient la voie à suivre. Cela dit, les avantages qui en découlent ne figurent pas au bilan des entreprises, et l’impact apparemment positif de ces efforts est difficile à suivre et à calculer. Comment, alors, comptabiliser l’influence positive des programmes de bien-être psychologique sur le capital social et humain?

Deux membres de la section canadienne du Réseau de leadership des chefs des finances du projet ACD, soit une représentante de la compagnie d’assurance Co-operators et une autre de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail, tentent de répondre à cette question. En se fondant sur le guide A4S Essential Guide: Social and Human Capital Accounting, leur équipe des finances respective a élaboré des exemples pratiques qui décrivent des méthodes servant à déterminer dans quelle mesure les initiatives de bien-être psychologique influent positivement sur les affaires de l’entreprise à long terme.

CO-OPERATORS : BIEN TRAITER SES EMPLOYÉS

Au Groupe Co-operators, l’occasion était belle de soumettre une analyse de rentabilité de la stratégie existante de promotion du bien-être psychologique, explique Karen Higgins, CPA, chef des finances de la compagnie et membre du Réseau de leadership des chefs des finances.

« Nous appuyons sans réserve cette initiative, parce que c’est la bonne chose à faire pour notre personnel, affirme Mme Higgins. Si, de surcroît, on peut en mesurer l’impact, tant mieux; c’est la cerise sur le gâteau. »

Quelques points saillants du projet Santé mentale lancé en 2016 chez Co-operators :

  • Formation sur le thème de la santé mentale (et soutien à cet égard), pour les employés
  • Formation destinée aux dirigeants
  • Création d’un site intranet
  • Refonte du programme d’avantages sociaux

Les exemples pratiques conçus par Co-operators décrivent la façon dont les responsables des finances, en partenariat avec le service des ressources humaines, ont analysé les coûts annuels mais aussi les avantages financiers associés à une stratégie axée sur la bonne santé psychologique des employés. Par exemple, ils ont émis l’hypothèse que le nombre de demandes de prestations d’invalidité à court et à long terme pour cause de problème de santé mentale diminuerait.

Ce type de congé de maladie fait donc l’objet d’un suivi, à des fins statistiques. Déjà, on observe des signes d’amélioration, dont ceux-ci :

  • Les programmes et les ressources internes de soutien en santé mentale sont de plus en plus utilisés par les employés.
  • La compagnie d’assurance a augmenté les montants de garantie de l’assurance collective Soins de santé mentale.
  • Elle a aussi obtenu l’attestation Or d’Excellence Canada pour son programme de promotion de la santé mentale au travail.

Même si, pour le moment, on n’a pas noté de réduction des demandes de prestations de congé de maladie, Mme Higgins dit observer l’incidence du projet Santé mentale dans ses échanges avec des employés. « Des collègues m’ont dit à quel point ils sont heureux de travailler pour une organisation qui se soucie de la santé mentale. »

« Si on s’attarde seulement aux prestations, on ne constate pas d’économies, mais, à long terme, nos efforts vont porter leurs fruits. Certes, les coûts globaux ont augmenté, mais c’est pour le bien des employés... Alors il y a bel et bien des avantages, même s’ils ne sont pas tangibles. »

WSIB : INSTAURATION D’UN CHANGEMENT DE CULTURE

La Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (WSIB), organisme chargé d’administrer les prestations d’invalidité des accidentés du travail en Ontario, a étoffé sa stratégie en santé mentale en 2017.

« Les maladies mentales sont en hausse », mentionne Pamela Steer, FCPA, FCA, qui était jusqu’à tout récemment à la barre des finances de la WSIB (elle est aussi membre du Réseau de leadership des chefs des finances). « Pour être un ambassadeur [des pratiques exemplaires auprès des employeurs], nous jugions important, comme organisme, d’être un chef de file des initiatives en santé mentale. »

Quelques mesures mises en place à la WSIB :

  • Instauration d’un programme de sensibilisation à l’importance de la santé mentale, pour tout le personnel
  • Formation sur la santé mentale au travail, pour tous les cadres supérieurs
  • Formation du personnel sur le thème de la résilience et de l’importance de prendre sa santé en main
  • Lancement d’un site intranet présentant les caractéristiques d’un milieu de travail sain
  • Organisation d’une activité de promotion du bien-être psychologique

L’exemple pratique de comptabilité durable élaboré par la WSIB impliquait de créer un modèle financier pour déterminer si l’initiative de santé mentale peut contribuer positivement aux résultats financiers. On pense ici à la réduction escomptée des prestations de congé de maladie dû à un problème de santé mentale (et à une réduction de la durée de ces congés), à une réduction de l’absentéisme et des coûts de recrutement, ainsi qu’à une hausse des taux d’engagement et de rétention du personnel.

L’équipe des finances de la WSIB a élaboré un tableau de bord reflétant les tendances qui se dégagent grâce aux programmes favorisant la santé psychologique du personnel. Ce tableau de bord permet aussi aux décideurs d’évaluer l’impact de ces programmes. Déjà, on constate des signes encourageants :

  • Davantage d’employés ont eu recours à des services axés sur le mieux-être psychologique.
  • Davantage d’employés ont profité d’un incitatif financier offert pour l’évaluation de leur forme physique.
  • Des sondages montrent que les cadres se sentent mieux préparés pour gérer les cas d’employés aux prises avec un problème de santé mentale.
  • Excellence Canada a décerné l’attestation Argent à la WSIB, en 2017, pour son programme de santé mentale.

« Nous avons réussi à éliminer les tabous liés aux problèmes de santé psychologique, explique Mme Steer. Nous instaurons une culture d’ouverture, d’acceptation et de tolérance. Il nous arrive à tous d’avoir des soucis, et il est normal d’aller chercher de l’aide. » [Voir Cachez-vous vos émotions au travail?]

Comme le montrent les sondages menés au sein de l’organisme, le personnel a adhéré au projet dès le début.

« Nos gens sont fiers de travailler pour nous, et l’importance accordée à la santé mentale est une des raisons », explique Leslie Morgan, directrice principale de l’analyse au service des ressources humaines de la WSIB et membre du projet sur la santé mentale.

UNE VISION À LONG TERME

Les données précises sont encore à établir, dans les deux organisations, d’autant plus que les projets en sont encore à leurs débuts, relativement parlant.

De l’avis de Mme Steer, il faut compter sur un horizon de cinq ans ou plus pour constater un réel changement de culture comme celui auquel aspire la WSIB. Tout comme chez Co-operators, le projet pilote de l’organisme ontarien n’est que le début d’une tentative à long terme pour mesurer l’incidence des programmes de bien-être psychologique dans les entreprises.

« Nous nous attendons à une hausse des coûts globaux, mais ce qui semble être une dépense se traduira plutôt par une meilleure productivité et un meilleur engagement, ainsi que par de plus faibles taux d’absentéisme et de rotation du personnel, avance Mme Steer. Nous sommes convaincus que le tout sera rentable avec le temps. »

LIRE DES EXEMPLES PRATIQUES

Le cas du Groupe Co-operators et celui de la WSIB font partie d’une série d’exemples pratiques en cours d’élaboration par le Réseau de leadership des chefs des finances – Section canadienne du projet Association pour la comptabilité durable (ACD). Ces leaders ont à cœur de voir s’appliquer des pratiques comptables tenant compte du capital social et du capital humain dans les entreprises, notamment selon les principes énoncés dans le document A4S Essential Guide: Social and Human Capital Accounting.