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Portrait d'un homme d'affaires
Canada
Impôts

Modifications fiscales : Ottawa doit faire preuve de prudence

Bruce Ball, FCPA et vice-président, Fiscalité, à CPA Canada, explique pourquoi toute proposition de modification doit être analysée en fonction des critères de la nécessité et de l’urgence, et rappelle l’importance des communications régulières.

Portrait d'un homme d'affaires Bruce Ball, FCPA, suggère de prévoir du temps pour des consultations constructives et de faire régulièrement le point sur les grandes initiatives.

Depuis près de deux ans, bon nombre d’entrepreneurs vivent des changements en tous genres, dont un accroissement de la charge de travail. Les CPA qui exercent dans les petits et moyens cabinets ne font pas exception.

Face à ces changements considérables, de nombreux fiscalistes et leurs clients disent avoir besoin de plus d’information sur bien des nouveautés annoncées par le gouvernement fédéral dans la dernière année, et aussi de plus de temps pour s’y adapter.

Dans les lignes qui suivent, Bruce Ball, FCPA et vice-président, Fiscalité, à CPA Canada, relaie les opinions exprimées par des membres et explique pourquoi le gouvernement fédéral doit examiner attentivement tout nouveau changement envisagé.

QUEL EST L’IMPACT DE LA PANDÉMIE SUR LES PETITS ET MOYENS CABINETS OFFRANT DES SERVICES DE FISCALITÉ?

Bruce Ball (BB) : La COVID-19 a eu des effets néfastes sur tout le monde; et les fiscalistes n’y échappent pas.

En plus de devoir faire face à leurs propres problèmes liés à la pandémie, ces CPA ont dû remplir les obligations fiscales de leurs clients. Et, hormis le report des dates limites de production accordé en 2020, ils ont dû respecter essentiellement les mêmes délais qu’avant la pandémie.

Beaucoup de CPA offrent également des services à des clients admissibles aux programmes d’aide ou de subvention liés à la pandémie. Le tout pendant qu’un nombre considérable de cabinets connaissent une rotation du personnel plus importante que d’habitude et peinent à trouver de nouveaux employés.

Bref, de nombreux membres, en particulier ceux qui exercent dans les petits ou moyens cabinets, se démènent pour abattre leur travail habituel, auquel s’ajoutent des tâches supplémentaires découlant de la pandémie.

QUELLES RECOMMANDATIONS CPA CANADA A-T-ELLE PRÉSENTÉES AU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL?

BB : Étant donné que les contribuables et leurs conseillers n’ont pas, dans ce contexte, une grande marge de manœuvre pour s’adapter à divers changements d’ordre fiscal, nous demandons au gouvernement fédéral de bien analyser la situation avant de se lancer dans les modifications proposées.

À notre avis, au cours de ce que nous espérons être les derniers stades de la pandémie, tout changement devrait être examiné sous l’angle de la nécessité et du caractère urgent. Il convient aussi de prévoir du temps pour des consultations constructives et de faire régulièrement le point sur les grandes initiatives.

Par exemple, dans son budget d’avril 2021, Ottawa a proposé que soit éliminé l’envoi des avis de cotisation en format papier pour les particuliers ayant produit leur déclaration T1 par voie électronique. Nous avons ensuite appris que ce changement s’appliquerait à la période des impôts 2022. Si cette proposition devait se concrétiser, elle aurait toute une incidence sur les déclarants par voie électronique, qui devraient se charger de la transmission de l’avis de cotisation à certains clients en plus d’avoir à expliquer les nouvelles règles aux contribuables inscrits à Mon dossier.

Heureusement, le gouvernement a maintenant confirmé que le changement ne s’appliquera pas à la période des impôts de 2022, pour les déclarations T1 de 2021. Il semble que cette modification sera plutôt reportée à juillet 2022. On nous a également mentionné que les parties prenantes seraient consultées.

Cette clarification est certes utile, mais des précisions auraient pu être fournies bien avant, pour éviter toute incertitude chez les professionnels en exercice. Par ailleurs, un autre report serait à notre avis judicieux, pour permettre plus de discussions. On le sait, les comptables seront occupés au moins jusqu’au 30 juin, et nous pensons qu’il reste encore beaucoup de questions importantes d’ordre logistique que l’ARC doit éclaircir. Pour que tous aient le temps d’examiner l’ensemble de ces questions, la transition devrait selon nous être reportée au plus tôt à l’automne.

POURQUOI LE MOMENT DE L’ENTRÉE EN VIGUEUR EST-IL SI IMPORTANT?

BB : Toutes les parties prenantes ont besoin de temps pour s’ajuster à un changement; il faut tenir compte de cette réalité dans le choix de la date d’entrée en vigueur d’une nouvelle initiative fiscale. Le gouvernement devrait se donner assez de temps pour consulter les contribuables avant l’adoption de dispositions législatives et pour régler les problèmes importants. Les contribuables doivent quant à eux pouvoir adapter leurs processus.

Ce point est particulièrement important pour les propositions comme la taxe de luxe, que les détaillants doivent appliquer à la vente de certains biens. Prévue initialement pour le 1er janvier 2022, la mise en œuvre de cette taxe a été reportée à une date à déterminer.

La création d’un système de perception et de versement d’une taxe demande du temps. Or, comme la taxe de luxe est de nature transactionnelle, les entreprises devront être prêtes avant la date d’entrée en vigueur. L’ARC doit aussi prévoir du temps pour l’envoi des formulaires et des indications. Nous nous demandons si le tout sera ficelé à temps.

Y A-T-IL D’AUTRES CHANGEMENTS POUR LESQUELS DES CLARIFICATIONS SE FONT ATTENDRE?

BB : Oui, les représentants de bon nombre de petits et moyens cabinets mentionnent qu’aucune information supplémentaire n’a été fournie, jusqu’ici, sur plusieurs autres propositions du budget fédéral de 2021. Par exemple, il n’y a pas eu de mise à jour officielle sur la question de savoir si les sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) peuvent se prévaloir d’une déduction immédiate des dépenses en capital plutôt que de demander un amortissement fiscal, sur les dépenses admissibles. Selon le budget fédéral de 2021, cette déduction est censée s’appliquer à des biens admissibles acquis après le 18 avril 2021. Or, certaines SPCC ont déjà dû produire leur déclaration de revenus sans savoir si la règle s’appliquera.

Par ailleurs, nous avons communiqué avec le gouvernement et préparé régulièrement des mises à jour à l’intention des CPA concernant les nouvelles règles proposées en matière de déclaration pour les fiducies et l’incertitude quant à la façon dont l’ARC allait concrétiser cette proposition. Même si ces modifications ont été reportées et si tout indique qu’elles ne s’appliqueront pas à l’année d’imposition 2021, nous attendons toujours des précisions quant au moment où ces déclarations seront exigibles.

DE QUELS AUTRES ENJEUX DISCUTEZ-VOUS AVEC L’ARC?

BB : Nous cherchons entre autres des moyens d’améliorer les communications sur les modifications que l’ARC apporte à son site Web. Le site contient beaucoup de renseignements utiles, mais à mesure que le volume d’information augmente, il devient difficile de suivre les ajouts et retraits, notamment les changements apportés aux annonces antérieures. Nous avons suggéré à l’ARC d’instaurer un système de suivi des modifications et avons bien hâte de discuter plus avant de cette question avec ses représentants.

POUR EN SAVOIR PLUS

Apprenez pourquoi il est temps de repenser les dépenses fiscales. Consultez nos nouvelles récentes sur la fiscalité et la COVID-19 ainsi que notre blogue sur le sujet, où vous trouverez notamment un webinaire sur la prestation de services fiscaux de grande qualité.