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Une aînée se sert d'une tablette dans son salon
Canada
Fraude

Mise en garde contre la fraude en ligne ciblant les personnes âgées

Les escroqueries en ligne liées aux sites de rencontres, à l’impôt sur le revenu et à l’achat de marchandises viennent en tête des 10 fraudes les plus courantes au Canada en 2018 – et les personnes âgées en sont les principales victimes. (Better Business Bureau)

Une aînée se sert d'une tablette dans son salonLes aînés se débrouillant mieux en ligne, les méthodes pour les piéger se raffinent, s’inquiète Mme Tamblyn Watts, directrice des politiques à la Canadian Association for Retired Persons. (Shutterstock/Dragana Gordic)

Parfois victimes d’arnaques comme tout le monde, les personnes âgées deviennent aujourd’hui la cible de choix des fraudeurs. Pourquoi?

En tête des 10 fraudes les plus courantes au Canada en 2018 rapportées par le Better Business Bureau : 1) les stratagèmes amoureux (perte financière : plus de 22,5 M$); 2) l’arnaque de l’impôt sur le revenu (perte financière : plus de 6 M$); et 3) l’arnaque lors d’achats en ligne (perte financière : plus de 3,5 M$).

Selon la Canadian Association for Retired Persons (CARP), les personnes âgées* sont particulièrement vulnérables. Les études le montrent, si elles se font escroquer, elles l’avouent rarement. Laura Tamblyn Watts, directrice des politiques à CARP, évoque cette honte qui les retient.

« Même avec nos proches, nous restons d’habitude assez discrets sur certains sujets, et parlons peu, notamment, de nos relations sentimentales, de nos finances, de nos rapports avec les instances gouvernementales. En cas d’arnaque, si la victime se tait, son entourage pourrait ne rien remarquer d’anormal. »

À la honte d’avoir été dupe s’ajoute la crainte de perdre son indépendance, explique Kathy Majowski, présidente du conseil du Réseau canadien pour la prévention du mauvais traitement des aînés. « C’est une inquiétude bien réelle chez les personnes âgées. Elles ne déclareront pas avoir été victimes d’une fraude de peur d’être jugées inaptes à gérer leurs affaires. »

Les escrocs ne le savent que trop, se désole-t-elle. Ils comptent d’ailleurs là-dessus et manœuvrent en conséquence. Voici trois raisons qui rendent les Canadiens vieillissants plus susceptibles de mordre à l’hameçon.

1. UN DÉSIR DE RAPPROCHEMENT

Les aînés vivent souvent seuls, sortent peu et bénéficient d’un soutien social et familial assez réduit, précise Mme Majowski. Se sentant délaissés, isolés, ils ont besoin de chaleur humaine.

Certains arnaqueurs prennent le temps de forger une relation – romantique ou platonique – avec leurs victimes afin de mieux leur soutirer de l’argent à long terme. D’autres, plus pressés, vont essayer de créer un sentiment de panique. Ainsi, dans l’arnaque des grands-parents, le fraudeur se fait passer pour le petit-fils de sa victime. Il prétexte un problème grave (p. ex., des démêlés avec la justice qui l’obligent à payer une forte caution) et la supplie de lui faire parvenir la somme au plus vite. Dans une escroquerie plus récente touchant l’Agence du revenu du Canada, le fraudeur exige, au nom de l’ARC, le paiement immédiat d’impôts non payés.

« Le fraudeur cherche à créer un sentiment d’urgence chez sa victime. Il l’empêche ainsi de rassembler ses idées, de consulter un proche ou un conseiller financier », résume Mme Majowski.

CONSEIL POUR DÉJOUER CE STRATAGÈME : CALMEZ-VOUS

Réfléchissez avant d’agir, recommande Mme Majowski. Restez sur vos gardes et prenez le temps de bien vous renseigner. S’agit-il d’une vente légitime? Est-ce que l’organisme communique habituellement avec vous de cette manière? Est-ce que la proposition vous semble trop bonne pour être vraie, ou quelque peu étrange?

Du même avis, Jeff Thomson, porte-parole du Centre antifraude du Canada (CAFC), rappelle les trois mots d’ordre à appliquer en matière de fraude : reconnaître, rejeter, rapporter. « Prenez du recul, faites vos recherches et assurez-vous de bien comprendre ce qu’on vous demande. Vous n’avez probablement jamais rencontré la personne avec qui vous traitez, vous ne savez rien d’elle. Soyez prudent. »

2. UN FAUX SENTIMENT DE SÉCURITÉ

De nos jours, les personnes âgées sont plus actives sur le Web. Elles font leur marché, leurs opérations bancaires et même des rencontres en ligne. D’après Statistique Canada, l’utilisation d’Internet est passée de 65 à 81 % chez les 65 à 74 ans, et de 35 à 50 % chez les 75 ans et plus, de 2013 à 2016.

« Beaucoup de gens, lorsqu’ils sont en ligne, se trouvent chez eux. Ils s’y sentent en sécurité et se permettent des choses qu’ils ne feraient peut-être pas hors de la maison », constate M. Thomson.

Les aînés se débrouillant mieux en ligne, les méthodes pour les piéger se raffinent, s’inquiète Mme Tamblyn Watts. Les fraudeurs utilisent les nouvelles technologies, comme le forage de données et le microciblage, pour recueillir le plus d’information possible sur leurs victimes. Les cybercriminels sont tout aussi habiles, sinon plus, que ceux qui s’efforcent de les arrêter, affirme-t-elle.

« Ces individus ne travaillent pas en amateurs. En fait, ils ont souvent une longueur d’avance sur les “pirates informatiques éthiques” (chapeaux blancs). Il ne s’agit pas d’épisodes isolés, mais d’une pratique qui s’est professionnalisée et qui se perfectionne sans cesse. On parle véritablement de crime organisé dont le but est de faire des profits. »

CONSEIL POUR DÉJOUER CE STRATAGÈME : TAISEZ-VOUS

Mme Tamblyn Watts recommande de se montrer prudent en ligne et d’éviter de divulguer des renseignements personnels, tels que votre adresse, les dates et le lieu de vos prochaines vacances, ou les noms que vous utilisez dans vos mots de passe.

« Nous vivons à l’ère de la technologie. Or, les personnes âgées, quand elles sont actives en ligne, sont peu conscientes des dangers qui les guettent. Les fraudeurs connaissent leurs proies; ils savent exactement le genre de données qu’ils pourront subtiliser et comment les exploiter. »

3. UN MANQUE DE CONNAISSANCES

L’arnaque n’est pas toujours facile à repérer, et les aînés sont souvent trop prompts à divulguer leurs données personnelles, estime M. Thomson. Ils ont tendance à faire confiance aux autres, à croire à ses dires un parfait inconnu, en particulier s’ils pensent avoir affaire avec les autorités, que ce soit en ligne, au téléphone ou à leur porte.

CONSEIL POUR DÉJOUER CE STRATAGÈME : INFORMEZ-VOUS

Apprenez à reconnaître les signaux d’alarme, conseille M. Thomson. Par exemple, si on vous presse d’envoyer beaucoup d’argent, sous forme de virement ou de carte-cadeau; si on vous enjoint de garder le silence sur les demandes ou les échanges que vous avez eus; si on vous dit ce que vous devez répondre à la banque, à votre conseiller financier, à votre famille et à vos amis qui pourraient s’interroger sur les raisons d’un soudain virement de fonds.

« Il revient à chacun de se renseigner et d’être vigilant. Un des buts du CAFC est de faire du Canada le pays le mieux sensibilisé aux escroqueries et aux fraudes. À part la fraude par marketing de masse et le vol d’identité, il faut compter avec les divers autres stratagèmes utilisés. »

Pour M. Thomson, la sensibilisation demeure le moyen le plus efficace de réduire et de prévenir la fraude sous toutes ses formes.

POUR EN SAVOIR PLUS

Visant à outiller les aînés aussi bien que les proches ou le conseiller financier d’un aîné, l’atelier de littératie financière Aider les aînés à déjouer les fraudeurs de CPA Canada leur permet de se prémunir contre la fraude. Aussi, dans l’Enquête de CPA Canada sur la fraude 2019, découvrez ce que les Canadiens pensent de la fraude et les mesures qu’ils prennent pour se protéger.

*Il n’existe pas de consensus sur le début de l’âge qui correspond au concept de personne âgée. Les organisations et organismes publics l’établissent à différents âges.