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Capitalisme des parties prenantes : ayez une stratégie claire

Lorsque les organisations souhaitent se fixer des objectifs autres que la seule rentabilité, les CPA sont au cœur de l’élaboration de la stratégie, de l’évaluation des risques et de la prise des décisions opérationnelles.

Groupe de gens d’affaires en réunion dans un bureauLe traitement réservé aux parties prenantes a une grande incidence à long terme, et les CPA peuvent jouer un rôle précieux à cet égard. (Getty Images/Cecilie_Arcurs)

Le capitalisme des parties prenantes n’est peut-être pas nouveau – la théorie remonte aux années 1950 –, mais c’est une philosophie qui gagne en intérêt, en particulier dans le contexte de la pandémie actuelle.

Il semblerait que des grandes entreprises veulent s’éloigner d’un objectif purement axé sur les profits. À preuve, des organismes influents, dont le Forum économique mondial et la Business Roundtable (groupement de 181 chefs de la direction d’entreprises parmi les plus puissantes des États-Unis), soutiennent l’idée que, d’un capitalisme par et pour les actionnaires, on passe à un capitalisme par et pour les parties prenantes, lequel serait le gage d’une prospérité soutenue.

Le traitement réservé aux parties prenantes a une grande incidence à long terme, et les CPA peuvent jouer un rôle précieux à cet égard, affirme Gord Beal, CPA, vice-président, Recherche, orientation et soutien, à CPA Canada. Ainsi, pour mesurer la performance d’une entreprise, il faut regarder au-delà des aspects financiers et tenir compte, entre autres, d’éléments intangibles tels que les ressources humaines, la culture et la confiance. Voilà un aspect important de l’initiative Voir demain : Réimaginer la profession de CPA Canada, dont l’axe de travail Création de valeur vise à cerner, à mesurer et à communiquer ces facteurs immatériels aux fins de la prise de décisions.

« Pour stimuler sa performance, l’entreprise doit considérer toutes les parties prenantes, explique M. Beal. Elle doit regarder vers l’avenir et se demander comment elle peut générer de la valeur d’une manière différente. »

À quoi ressemble le capitalisme des parties prenantes, dans la pratique, et comment les entreprises peuvent-elles traduire leurs engagements en actions?

Selon les experts consultés, il faut élaborer une stratégie claire. Voici trois conseils pour ce faire.

1) MONTREZ L’EXEMPLE

Les dirigeants d’entreprise jouent un rôle de premier plan dans l’instauration et le maintien de la confiance nécessaire pour rallier les troupes au capitalisme par et pour les parties prenantes, tout en veillant à ce que les actions menées débouchent sur des résultats.

« Il faut convaincre les personnes concernées que c’est réalisable. Et c’est le processus lui-même qui va instaurer la confiance, pense M. Beal. Ça passera par les mesures que les entreprises et les dirigeants prendront. S’ils déclarent qu’ils vont faire ceci ou cela, alors ils doivent aller jusqu’au bout. »

C’est là également que la responsabilité et la transparence entrent en jeu, et les CPA se révéleront inestimables pour diriger l’élaboration d’une stratégie, l’évaluation des risques et la prise des décisions opérationnelles, ajoute Gord Beal.

« Les comptables ont l’occasion de jouer un rôle important en s’assurant que l’organisation remplit ses engagements, non seulement en termes d’information financière, mais aussi dans la manière dont elle met en œuvre sa stratégie et ses mesures de “performance” au sens général. Ce rôle sera de plus en plus au cœur de notre profession. »

2) AYEZ UNE PERSPECTIVE

Les entreprises soucieuses du capitalisme des parties prenantes le font dans une perspective à la fois de long et de court terme, soutient Allan Donald, associé en audit et certification chez Deloitte.

La durabilité, dit-il, ne consiste pas à choisir et à soutenir une cause, telle que la protection de l’environnement ou la promotion de la diversité et de l’inclusion. Il s’agit de déterminer comment l’ensemble de l’organisation va se maintenir dans les années à venir. Et pour cela, il faut envisager l’avenir dans une optique plus large, pour préserver sa pertinence aux yeux de toutes les parties prenantes concernées.

« De plus en plus de grandes organisations ont des horizons d’investissement à très long terme... la question est de savoir comment votre entreprise peut survivre à long terme si elle ne tient pas compte de toutes ses parties prenantes. Si vous manquez à vos engagements envers un des groupes, vous aurez brisé un maillon de la chaîne. »

Dans une perspective à court terme, ajoute M. Donald, l’impact d’une pandémie et des mouvements sociaux met en lumière l’état des organisations, leurs forces et leurs faiblesses, ainsi que les mécanismes de soutien qu’elles ont ou n’ont pas mis en place pour ceux qu’elles représentent.

« Les entreprises sont actuellement soumises à un stress, et c’est dans ce genre de situation que leurs comportements, bons ou moins bons, sont accentués, sous l’œil de nombreux observateurs. On les juge sur la base de leurs comportements, et particulièrement en fonction de ce qu’elles ont déjà déclaré », explique M. Donald.

« Les entreprises se rendent compte qu’elles font partie d’un écosystème et que si elles ne contribuent pas à la survie de celui-ci, leur propre essor pourrait être en péril. »

3) DÉTERMINEZ À QUI VOUS RENDEZ DES COMPTES

Bien comprendre qui sont vos parties prenantes exige un travail d’analyse, précise Allan Donald.

Une évaluation de l’importance relative, explique-t-il, aidera l’entreprise à déterminer les groupes envers qui elle est responsable, mais aussi leur poids dans la balance, leurs besoins et leurs exigences ainsi que les façons d’y répondre.

Au cours de cette évaluation, il est essentiel de prendre contact avec les parties prenantes pour entendre de leur bouche ce qui leur importe, plutôt que de supposer ce qu’il faut faire pour les servir au mieux. Pour y parvenir, on optera, par exemple, pour des sondages ou des rencontres, selon la nature du groupe.

« Dans le cadre de cette planification, il y a lieu d’avoir des échanges avec les diverses parties prenantes pour déterminer ce qui compte pour elles. On peut présumer que le meilleur moyen pour une entreprise de créer de la valeur est d’aligner ses objectifs sur les intérêts des divers groupes. »

Déterminer la façon dont une entreprise répond aux attentes de ses parties prenantes exige aussi une analyse des risques, en vue de cerner les lacunes et les points à améliorer, renchérit M. Beal.

« Si l’on considère l’impact sociétal et environnemental de manière plus générale, les entreprises courent des risques au niveau de leur mode de fonctionnement, de leur lieu d’activité, de la nature des produits qu’elles vendent, etc. Ça fait partie Intégrante de l’identité de l’entreprise, et tout ça influera sur sa stratégie organisationnelle et sa gestion des risques. »

C’est un changement systémique qui se produit, ajoute M. Beal, au vu des questions générales qui sont posées plus souvent, même par les actionnaires eux-mêmes. « Ce n’est peut-être pas lié aux résultats financiers immédiats, mais c’est lié à la capacité de l’entreprise à durer dans le temps. »

FAITES CE QUI EST BIEN

Selon le troisième rapport annuel de Deloitte sur l’état de préparation, intitulé The Fourth Industrial Revolution: At the Intersection of Readiness and Responsibility et publié en janvier 2020, près de 60 % des cadres (comparativement à 35 % il y a deux ans) ont déclaré que l’augmentation de l’impact positif de leur entreprise sur la société était un des cinq résultats souhaités pour L’Industrie 4.0. Quelles principales raisons d’agir en ce sens étaient invoquées? Les pressions des parties prenantes externes et des employés.

Bien qu’on perçoive un certain scepticisme quant à l’enracinement du capitalisme des parties prenantes, ou à l’établissement d’un cadre officiel pour cette approche, M. Donald estime qu’une entreprise qui ne prend pas en considération cette tendance risque de se laisser distancer. Les parties prenantes se font de plus en plus entendre et unissent souvent leurs forces, notamment grâce aux médias sociaux, dit-il. Ces groupes expriment ce qui, selon eux, doit être changé, encouragé et poursuivi, tant au sein de l’entreprise que dans la société dans son ensemble.

« Si vous faites fi de l’opinion des parties prenantes, ce sera à vos risques et périls, car sachez qu’elles ont de l’influence, rappelle M. Donald. Si vous n’avez pas cherché à comprendre ce qui est important ou précieux pour elles, et que vous n’y avez pas encore réfléchi, vous risquez de voir des événements critiques avoir de graves conséquences sur votre entreprise. »

COMPTABILITÉ DURABLE

Participez au projet Voir demain : Réimaginer la profession de CPA Canada. Vous aurez ainsi l’occasion d’échanger avec d’autres sur la façon dont la profession adopte la mesure de la valeur au-delà des résultats financiers; établit de nouveaux modèles de gouvernance des données; définit les aptitudes et compétences requises; et se fait le porte-étendard de l’intégrité, de la confiance et de l’éthique.

Enfin, voyez comment un géant de l’industrie minière canadienne a adopté une optique d’investissement socialement responsable fondée sur des facteurs ESG.