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Portrait de Joy Thomas
Articles de fond
Magazine Pivot

Joy Thomas : bilan et perspectives

Pour la présidente et chef de la direction sortante de CPA Canada, la pandémie est train de changer irrémédiablement notre façon de travailler.

Portrait de Joy ThomasJoy Thomas a quitté ses fonctions de présidente et de chef de la direction de CPA Canada en juillet. (Photo Matt Barnes)

En juillet, après quatre belles années à la tête de CPA Canada, j’ai quitté mes fonctions de présidente et de chef de la direction. Voici donc mon dernier mot dans Pivot, une publication dont je tire fierté et que je continuerai à lire avec intérêt. 

J’ai informé le Conseil d’administration de ma décision en 2019. Mon départ vient clore une vingtaine d’années consacrées à l’avancement de la profession comptable canadienne, où j’ai été une témoin privilégiée de nombreux changements positifs. Unification de la profession, évolution de nos modèles de formation, apport au développement économique et sociétal, rayonnement sur la scène mondiale : sans contredit, la profession a relevé maints défis. 

L’irruption de la pandémie a déstabilisé les employeurs et les clients, et remis en question les fondements mêmes du travail. Dire qu’elle nous a poussés à revoir nos façons de faire est une évidence. Le travail, déjà roi dans notre vie, se mêle plus que jamais à la sphère personnelle. Les frontières se brouillent.

Rivé à son écran, on s’accommode d’arrangements provisoires, assis à la table de la salle à manger ou relégué au sous-sol. On repense les démarcations invisibles du passé, qui séparaient travail et maison, deux mondes qui n’en forment plus qu’un, où quelques pas suffisent pour se rendre au bureau. Nous bénéficions ainsi d’un supplément de temps, un temps qui, étrangement, semble plus flou qu’avant.

Les nouvelles réalités du télétravail ont obligé les chefs d’équipe à innover pour motiver leurs troupes virtuelles et accueillir les recrues sans les avoir rencontrées en personne. Les chefs des finances, de leur côté, réfléchissent à tous ces bureaux vides, occupés il y a quelques mois, aujourd’hui désertés. Faut-il réduire la superficie des locaux et passer à des bureaux partagés? Les coûts fixes seront abaissés d’autant.

L’après-covid pourrait faire place à une révolution et remettre en question des principes de base : comment travailler? Où? Pourquoi?

Soit, mais ce qui nous manque, c’est la camaraderie, la collaboration sur place, qui fait jaillir les idées. Cela dit, qui regrette les interminables trajets, matin et soir? Et puis, l’empreinte carbone, qu’alourdissaient les voyages d’affaires incessants, s’est allégée. Un équilibre subtil reste à trouver.

John Trougakos, spécialiste du comportement organisationnel, enseigne à l’école de gestion Rotman de l’Université de Toronto, où il dirige une équipe qui, en mars, a lancé un sondage en ligne sur les réalités du télétravail.

À noter, seuls 17 % des 700 répondants veulent retrouver le statu quo et 83 % espèrent un modèle différent. Qui plus est, 60 % préféreraient un horaire réduit (8 heures par jour, 4 jours par semaine). Le professeur affirme aussi, se fondant sur des recherches menées en Europe et ailleurs, que rien ne prouve que de tels réaménagements compromettent la bonne marche de l’entreprise. Dans les faits, l’accumulation de stress, les déplacements épuisants, les interruptions fréquentes au travail, qui entravent la productivité, coûtent des milliards aux employeurs, tous les ans.

La dissociation de l’activité professionnelle et du lieu de travail soulève des questions épineuses. Certaines datent d’avant la pandémie, mais voilà qu’elles revêtent une pertinence renouvelée. Doit-on être joignable en tout temps? Quel est l’effet psychologique de ces longues vidéoconférences?

Ces derniers mois, John Trougakos a été sollicité par de nombreux chefs de la direction et chefs des finances qui s’interrogeaient : comment piloter de grandes organisations éclatées, dispersées, virtualisées? Le chercheur a notamment observé que les travailleurs qui ont réussi à réduire leur stress en éliminant les déplacements, en ménageant des pauses régulières et, comme certains dirigeants de Silicon Valley, en méditant, ont gagné en créativité et en efficacité, par des efforts concentrés sur de courtes périodes. « Quand on prend du recul, même si c’est paradoxal, un constat ressort : pouvoir travailler moins mais mieux serait la clé. »

La principale leçon à retenir? On l’a remarqué, avant le déferlement de la COVID, le monde du travail restait fondé sur le modèle industriel. Employés et supérieurs se rassemblaient aux mêmes endroits, aux mêmes heures, jour après jour. Oui, les technologies (cellulaires, ordinateurs portables) ont érodé le modèle, mais à peine. Il suffit de penser aux lieux de travail tels qu’ils se déclinaient avant la pandémie pour s’en convaincre. Si nombre d’observateurs entrevoient une quatrième révolution industrielle, l’après-COVID pourrait faire place à une révolution du travail, une remise en question des principes de base, en somme. Comment travailler? Où et pourquoi? Pour esquisser quelques réponses, Pivot vous propose un dossier sur l’avenir du travail. 

Fin de la poignée de main, nouveaux cabinets comptables virtuels, évolution de l’économie de la pige, espaces de travail post-covidiens figurent parmi les nombreux sujets abordés.

En conclusion, sachez que l’avenir de CPA Canada est en bonnes mains. Charles-Antoine St-Jean, FCPA, FCA, nouveau président et chef de la direction, prend la relève. Nous nous connaissons depuis longtemps et nous avons siégé au Conseil de la Fondation canadienne pour l’audit et la responsabilisation. Fort de son cheminement exceptionnel et de ses compétences étendues, M. St-Jean saura, j’en suis convaincue, guider l’organisation d’une main sûre, alors que s’amorce une époque sans précédent. 

Avant de se joindre à CPA Canada, M. St-Jean a été nommé, en 2017, président du Conseil sur la comptabilité dans le secteur public, où il avait siégé de 2006 à 2009. De plus, de 2004 à 2007, il a été contrôleur général du Canada.

M. St-Jean a obtenu son titre comptable chez EY, où il est devenu associé et associé directeur. Son parcours l’a amené à travailler auprès de clients du secteur public de tous les ordres de gouvernement, y compris de nombreuses sociétés d’État, tant au Canada qu’à l’étranger. Il a aussi exercé quelques années chez KPMG en Europe. 

M. St-Jean a donné des conférences sur la gouvernance et la gestion financière dans le secteur public à l’Université Laval (programme du Collège des administrateurs de sociétés) et à l’Université d’Ottawa pendant des années.

Pour relever les défis qui se profilent, la pensée créatrice et le leadership agile seront nos atouts. Et la profession comptable canadienne, qui s’est taillé une brillante réputation dans le monde entier, se positionne comme chef de file pour façonner l’avenir.

VERS L’AVENIR

Découvrez ce que l’avenir réserve à la comptabilité et quelles perspectives se dégagent du projet Voir demain, lancé par CPA Canada.

Voyez également comment vous fixer des limites, être productif en suivant un horaire et diriger une équipe à distance. De plus, apprenez quelques règles d’étiquette et pratiques exemplaires pour participer aux rencontres vidéo en télétravail.