Passer au contenu principal
Un homme d’affaires à l’extérieur
Articles de fond
Portraits

« Je peux constater le fruit de nos efforts dans nos communautés »

Ernie Daniels, CPA, PDG de l’Administration financière des Premières Nations, parle de marchés financiers, de déficit d’infrastructures et de projets pilotes d’énergie verte.

Un homme d’affaires à l’extérieurLa passion d’Ernie Daniels, un Cri et Chipewyan, pour la recherche de solutions l’a mené à une carrière en comptabilité. (tous droits réservés)

Depuis qu’il a accepté le poste de président-directeur général de l’Administration financière des Premières Nations (AFPN), en 2012, Ernie Daniels a grandement contribué à faire connaître les efforts de l’OSBL visant l’accès des communautés des Premières Nations au financement.

Originaire de la Première Nation de Salt River, qui regroupe des Cris et Chipewyans des Territoires du Nord-Ouest, le CPA et gestionnaire financier autochtone accrédité (GFAA) s’est joint à l’AFPN après sept ans comme président et directeur de l’exploitation d’AFOA Canada. Il a aussi occupé le poste de directeur de l’évaluation et des opérations financières à la Fondation autochtone de guérison pendant cinq ans.

Notre entretien avec Ernie Daniels a porté sur sa carrière, les jalons importants de son parcours et son intention de favoriser la monétisation des infrastructures dans les communautés autochtones.

CPA CANADA : Qu’est-ce qui vous a mené à une carrière en comptabilité?
Ernie Daniels (ED) : Je me suis inscrit en administration des affaires au nouveau collège de Fort Smith, où j’ai fait partie de la première promotion.

La comptabilité, c’est naturel chez moi. J’adorais présenter une vue d’ensemble et chercher des réponses aux questions. J’ai ensuite décidé de suivre un programme de CGA pendant que j’occupais un emploi et j’ai vite constaté qu’il y avait peu de comptables professionnels autochtones. À l’époque, il n’y en avait qu’une vingtaine, tout au plus, au Canada.

J’ai eu la chance de travailler pour une société de développement autochtone, dont je suis devenu le président à 30 ans. Par la suite, j’ai exercé en cabinet, mais la passion n’était pas au rendez-vous. C’est la collaboration avec les organismes des Premières Nations qui me faisait réellement vibrer. C’était important pour moi d’aider nos communautés à améliorer leurs conditions de vie.

CPA CANADA : Qu’est-ce qui vous a incité à vous joindre à l’AFPN?
ED : Même si l’AFPN en était à ses débuts, je savais qu’elle jouerait un rôle crucial dans le développement socioéconomique des Premières Nations au Canada en leur offrant l’accès à du financement à des taux préférentiels. J’ai compris qu’aider les Premières Nations à accéder aux marchés financiers était un mandat vaste et très important.

Avant le premier prêt consenti par l’AFPN, en juin 2012, les Premières Nations étaient la dernière forme d’administration publique au Canada devant encore se tourner vers les banques pour obtenir des fonds sous forme de prêt. Les administrations locales et les gouvernements provinciaux, quant à eux, ont tous accès au financement par les marchés financiers. Ces emprunts bancaires à taux élevé étaient souvent accompagnés d’une convention de sûreté générale sur tous les actifs actuels et futurs des Premières Nations, leurs revenus, les fonds en banque, etc.

En 2012, nous avons accepté les cinq premiers membres emprunteurs des Premières Nations dans le but d’obtenir des fonds de l’AFPN, en plus d’accorder notre premier prêt. Nous comptons maintenant 142 membres.

CPA CANADA : En quoi l’accès aux marchés financiers était-il un mandat important?
ED : Les investisseurs connaissaient peu le fonctionnement des communautés des Premières Nations. Par ailleurs, il y avait peu de données financières sur les Premières Nations; il était donc difficile d’établir des comparaisons avec d’autres créanciers. Nous avons dû commencer par informer les marchés financiers internationaux. De leur côté, les Premières Nations devaient être renseignées sur les exigences de ce processus.

En 2014, nous avions suffisamment de prêts pour entrer sur le marché, émettre notre première débenture et aller chercher une cote de crédit. L’obtention d’une cote de « catégorie investissement » était un jalon très important pour nous en tant que groupe emprunteur.

À ce jour, nous avons émis neuf débentures, pour un total de 1,7 G$; obtenu une cote de crédit de Aa3 du Moody’s Investors Service et une cote A+ de S&P Global Ratings; et attiré un nombre croissant d’investisseurs étrangers.

CPA CANADA : Quels enjeux autochtones majeurs retiennent votre attention?
ED : Les infrastructures inadéquates. Nous estimons qu’au moins 30 G$ seraient nécessaires pour avoir des infrastructures semblables à celles des municipalités.

J’ai travaillé avec le gouvernement du Canada pour combler le déficit d’infrastructure et « monétiser » les paiements de transfert au lieu de suivre le modèle de répartition habituel « au fur et à mesure ». Nos efforts portent leurs fruits, et je suis convaincu que nous pouvons atteindre notre objectif. Nous nous préparons à lancer un projet pilote d’énergie verte afin de prouver que la monétisation fonctionne.

Nous examinons également la question des assurances, car de nombreuses communautés, surtout les communautés éloignées, n’obtiennent pas la couverture dont elles ont besoin. Et lorsqu’elles y ont accès, cette couverture est coûteuse. Nous continuons de chercher des solutions pour offrir de meilleures garanties à nos membres et aux Premières Nations. Une des solutions envisagées est de regrouper le pouvoir d’achat des Premières Nations afin d’obtenir de meilleures garanties et de meilleurs tarifs. À l’heure actuelle au Canada, il n’existe aucun modèle autochtone d’assurance collective axé sur les OSBL autochtones.

CPA CANADA : De quelles réalisations êtes-vous le plus fier?
ED : J’ai toujours souhaité améliorer la qualité de vie dans nos communautés. Le succès peut prendre diverses formes; la saine gestion financière en est une.

À la Fondation autochtone de guérison, j’ai géré un budget de 350 M$ pour mettre en place un système et des politiques et créer une organisation efficace, un concept tout nouveau à l’époque. Grâce à nos investissements, nous avons réussi à doubler le financement et à définir des critères pour que les communautés puissent mettre en œuvre et financer leur propre programme de guérison.

AFOA Canada (qui s’appelait alors l’Association des agents financiers autochtones du Canada) en était aussi à ses débuts. Quand j’ai décroché la présidence, nous comptions environ 200 membres. À mon départ, ce nombre s’élevait à plus de 1 000. Pendant mon mandat, nous avons aussi élaboré le programme de gestion financière autochtone.

J’adore mon travail, car je peux constater le fruit de nos efforts dans nos communautés.

Découvrez le cheminement vers l’entrepreneuriat pour les femmes autochtones, la lutte d’un CPA pour la création de logements abordables pour les Autochtones et la façon dont l’accroissement des connaissances financières jette les bases d’une plus grande autonomie.

LECTURES COMPLÉMENTAIRES

Découvrez le rôle du réseautage dans la réussite des femmes autochtones, la lutte d’un CPA pour la création de logements abordables pour les Autochtones et la façon dont l’amélioration des connaissances financières jette les bases d’une plus grande autonomie chez les Autochtones.

De plus, CPA Canada vous offre une introduction à la culture des peuples autochtones. Cette courte formation sur demande explore l’histoire des Premières Nations et des peuples inuits et métis, ainsi que les effets dévastateurs de la colonisation sur les communautés et économies autochtones abordés selon une perspective autochtone.