Appréciation de la fiabilité des informations produites par des processus automatisés

De nombreux auditeurs d’états financiers utilisent des outils et techniques automatisés (OTA) dans divers aspects de leurs audits. Les OTA sont des processus fondés sur les technologies de l’information (TI) qui impliquent l’automatisation des méthodes et des procédures, comme l’analyse de données à l’aide de la modélisation ou de la visualisation. Toutefois, si vos OTA utilisent des informations qui ne sont pas suffisamment fiables, cela pourrait avoir d’importantes répercussions sur votre audit.

Ce blogue est destiné aux auditeurs qui utilisent des OTA. Grâce au présent billet, vous saurez :

• quelles sont les caractéristiques pertinentes pour examiner ou apprécier la fiabilité des informations que vous utilisez dans vos OTA;
• quels sont les facteurs qui peuvent vous aider à évaluer l’importance de ces caractéristiques.

Compte tenu de l’évolution de la technologie, de grandes quantités d’informations et de nombreux types de sources d’informations sont disponibles (médias sociaux, données ouvertes, chaînes de blocs, automatisation robotisée des processus, Internet des objets, drones, etc.). L’utilisation d’OTA vous permet d’intégrer des informations provenant de diverses sources, à la fois internes et externes à l’entité, et d’utiliser de plus grands volumes d’informations dans les analyses. Cependant, toutes les informations que vous utilisez n’ont pas le même degré de fiabilité.

Lorsque vous concevez et mettez en œuvre des procédures d’audit faisant appel à des OTA pour obtenir des éléments probants suffisants et appropriés, comment appréciez-vous la fiabilité des informations, y compris celles produites par l’entité?

Selon le paragraphe 7 de la Norme canadienne d’audit (NCA) 500, Éléments probants, vous devez tenir compte de la pertinence et de la fiabilité des informations devant servir comme éléments probants, y compris de celles provenant d’une source d’informations externe. Lorsque vous utilisez des informations produites par l’entité, le paragraphe 9 de la même norme stipule que vous devez évaluer si ces informations sont suffisamment fiables pour répondre à vos besoins et, selon que les circonstances l’exigent :

• obtenir des éléments probants sur l’exactitude et l’exhaustivité de ces informations;
• apprécier si les informations sont suffisamment précises et détaillées pour répondre à vos besoins.

Caractéristiques ayant une incidence sur la fiabilité des informations

Si les informations que vous utilisez pour concevoir et appliquer vos OTA ne sont pas fiables, ces OTA ne constitueront pas une source utile d’éléments probants. Les informations doivent posséder certaines caractéristiques, dont vous pouvez tenir compte lorsque vous utilisez des OTA, pour être considérées comme étant fiables. Ces caractéristiques, décrites ci-après, sont les suivantes :

• exactitude et exhaustivité;
• authenticité et crédibilité;
• partialité;
• degré de précision et niveau de détail.

Exactitude et exhaustivité

L’exactitude consiste à savoir si les informations sont exemptes d’erreurs dans la façon dont elles reflètent les situations, événements, circonstances, actions ou inactions sous-jacents, et notamment si elles le font au moment opportun. L’exhaustivité, quant à elle, consiste à déterminer si les informations reflètent l’ensemble des situations, événements, circonstances, actions ou inactions sous-jacents qui sont pertinents.

Authenticité et crédibilité

L’authenticité consiste à déterminer si la source a effectivement produit ou fourni les informations et si elle a été autorisée à le faire, tout en s’assurant que ces informations n’ont pas été modifiées de façon inappropriée. Afin de déterminer si les informations sont crédibles, vous pouvez vous demander si la source a la compétence nécessaire pour produire les informations et si vous pouvez lui faire confiance.

Partialité

Il est important de comprendre la partialité des informations dont l’utilisation est envisagée, afin d’être en mesure de déterminer les erreurs ou fraudes possibles et d’exercer son jugement professionnel. Vous pourriez notamment vous demander si les informations que vous envisagez d’utiliser sont exemptes de tout parti pris, intentionnel ou non, quant à la manière dont elles reflètent les situations, événements, circonstances, actions ou inactions sous-jacents. Lorsque vous réfléchissez à la partialité dans le contexte des informations que vous prévoyez d’utiliser comme éléments probants, n’oubliez pas qu’il existe également un risque de parti pris de votre part lors de l’utilisation d’OTA. Le parti pris lié à l’automatisation en est un exemple et il correspond à la tendance à favoriser les résultats générés par des systèmes automatisés, même lorsque le raisonnement humain ou la présence d’informations contradictoires mettent en doute la fiabilité ou l’adéquation de ces résultats.

Degré de précision et niveau de détail

Les informations doivent être suffisamment précises et détaillées pour les besoins de la procédure d’audit. Dans certains cas, vous pouvez avoir l’intention d’utiliser les informations produites par l’entité pour répondre à plusieurs besoins de l’audit. Une information peut être suffisamment précise et détaillée pour un besoin, mais pas pour un autre.

Facteurs ayant une incidence sur l’importance relative des caractéristiques

Lorsque vous appréciez la fiabilité des informations devant être utilisées comme éléments probants, les caractéristiques susmentionnées et leur importance relative peuvent varier en fonction de divers facteurs. Par ailleurs, toutes les caractéristiques ne sont pas nécessairement pertinentes dans toutes les circonstances. Voici des facteurs dont vous pouvez tenir compte ainsi que des exemples illustratifs s’y rapportant.

L’objectif de la procédure d’audit

Mettez-vous en œuvre une procédure d’évaluation des risques ou une procédure d’audit complémentaire (c’est-à-dire un test des contrôles ou une procédure de corroboration)? Vous pouvez utiliser le rapprochement pour créer un rapport qui compare le coût unitaire figurant sur la facture à celui qui figure sur le bon de commande connexe afin de relever tout écart qui dépasse le seuil que vous avez prédéterminé, le cas échéant. Si les résultats des OTA sont utilisés pour comprendre le système de contrôle interne de l’entité lors de la mise en œuvre des procédures d’évaluation des risques, il se peut que vous déterminiez qu’il n’est pas nécessaire d’évaluer l’exactitude et l’exhaustivité de ces informations, ou qu’il n’est pas nécessaire qu’elles soient aussi précises ou détaillées. Toutefois, lorsque les résultats des OTA seront utilisés dans le cadre de la mise en œuvre d’une procédure d’audit complémentaire, vous pourriez juger nécessaire d’évaluer l’exactitude et l’exhaustivité de ces informations.

La source des informations

L’accès aux informations se fait-il par le biais d’une source interne ou externe? Vous pouvez utiliser un modèle dans le cadre de vos tests des stocks d’une entité qui sont exposés à l’obsolescence technologique. De plus, vous pourriez obtenir des informations d’un tiers indépendant, comme une association sectorielle, concernant les développements technologiques qui pourraient avoir une incidence négative sur l’évaluation des stocks d’une entité. Ces informations sont peut-être moins susceptibles de faire l’objet d’un parti pris de la direction, mais leur authenticité et leur crédibilité sont probablement importantes.

La nature des informations

Les informations sont-elles quantitatives ou qualitatives, et quel en est le niveau de détail? Les informations utilisées dans l’application de statistiques sommaires aux fins de l’analyse des prix moyens de location immobilière dans un pays ne sont peut-être pas suffisamment précises pour être utilisées dans la mise en œuvre de procédures d’audit complémentaires visant à tester les produits d’une entité immobilière. Cependant, les informations utilisées dans les OTA pour établir les prix moyens de location immobilière dans une banlieue donnée pourraient être suffisamment précises.

Les contrôles sur la préparation et la mise à jour des informations

Quelle est votre compréhension des contrôles relevés et dans quelle mesure avez-vous l’intention de vous appuyer sur ces contrôles? Vous pouvez utiliser des rapprochements ou des triples rapprochements combinés à la visualisation pour cerner les entrées de journal présentant des caractéristiques inhabituelles liées à la nature, à la taille, au calendrier et à l’autorisation. Si vous déterminez que les contrôles afférents aux écritures de journal ont été conçus de manière appropriée et qu’ils ont été mis en œuvre, votre travail pour apprécier la fiabilité des informations provenant des écritures de journal utilisées dans les OTA pourrait être moindre que si l’entité était dépourvue de contrôles, ou que si vous n’aviez pas testé l’efficacité du fonctionnement des contrôles.

La façon dont les informations ont été obtenues et la forme sous laquelle elles l’ont été

Avez-vous obtenu les informations directement? Les informations proviennent-elles d’un rapport personnalisé créé par l’entité? Avez-vous dû effectuer une manipulation des données pour obtenir les informations dans un format utilisable dans le cadre de votre audit? Aux fins de votre analyse automatisée du classement chronologique des créances clients, vous avez peut-être extrait des informations directement du grand livre auxiliaire. Dans ce cas, il se peut que vos travaux d’audit concernant la fiabilité de ces informations soient moins étendus que lorsque vous utilisez des soldes extraits par la direction. Vous pourriez aussi avoir obtenu des informations d’une source externe et les avoir fusionnées avec des informations internes fournies par l’entité que vous auditez. Lorsque vous fusionnez ou regroupez des informations, il peut être important de savoir si votre processus est correctement planifié pour atteindre le degré de précision et le niveau de détail nécessaires pour les procédures que vous prévoyez de mettre en œuvre.

L’importance relative de la procédure mise en œuvre

La procédure en cours de mise en œuvre et les informations utilisées sont-elles votre source principale d’éléments probants? Vous avez peut-être mis au point un modèle qui constitue votre source principale d’éléments probants concernant la provision pour passif au titre des garanties de l’entité. Lors de l’appréciation de la fiabilité des informations qui sous-tendent votre modèle, notamment les facteurs influant sur la probabilité de retours de produits et les coûts rattachés aux réclamations au titre des garanties, il se peut que la prise en compte des caractéristiques doive être plus importante à l’égard de ces informations que dans le cas d’une provision pour passif au titre des garanties relativement à laquelle il existe d’autres sources d’éléments probants pour corroborer les conclusions et atteindre l’objectif de la procédure d’audit.

L’évaluation du risque d’anomalies significatives et les raisons qui sous-tendent cette évaluation

Le risque d’anomalies significatives visé par votre procédure d’audit complémentaire est-il autre que faible? Le calcul des produits effectué par l’entité peut faire largement appel au jugement de la direction, étant donné les nombreuses dispositions contractuelles différentes et les différentes interprétations possibles quant au moment de la comptabilisation des produits. Vous avez déterminé qu’il existe un risque présumé de fraude (et donc un risque important) lié la surévaluation des produits en raison d’un parti pris possible de la direction en faveur d’une telle surévaluation. Par conséquent, en raison des jugements importants portés par la direction, la caractéristique de partialité s’appliquerait dans une plus grande mesure comparativement aux produits qui sont comptabilisés d’après les dépôts reçus.

En résumé

En somme, il faut faire preuve de jugement professionnel pour évaluer si les informations qui seront utilisées dans les OTA sont suffisamment fiables pour répondre à vos besoins. Ce blogue présente les caractéristiques possibles des informations fiables ainsi que divers facteurs susceptibles de vous aider à respecter les dispositions de la NCA 500 aux fins de l’appréciation de la fiabilité des informations devant être utilisées comme éléments probants. Selon la mesure dans laquelle les informations destinées à être utilisées comme éléments probants correspondent aux caractéristiques applicables, il vous faudra effectuer plus ou moins de travail pour en arriver à la conclusion que ces informations sont suffisamment fiables.

Poursuivons la conversation

Les considérations relatives à la fiabilité des informations vous semblent-elles compliquées? Quelles difficultés rencontrez-vous le plus souvent? Devant la prodigieuse expansion des technologies émergentes et l’éventail élargi de sources d’informations à utiliser comme éléments probants, faut-il étoffer les NCA pour améliorer votre capacité à apprécier la fiabilité des informations? Le Conseil des normes internationales d’audit et d’assurance (IAASB) a entrepris la révision de la Norme internationale d’audit (ISA) 500, Éléments probants, sur laquelle la NCA 500 est fondée. Si vous avez des idées quant aux changements qui pourraient devoir être apportés à la norme, publiez un commentaire ci-dessous ou envoyez-moi un courriel. Je suis impatiente de connaître votre point de vue.

Conversations sur la qualité de l’audit se veut un forum d’échange concernant les faits et problèmes nouveaux survenant à l’international en matière de qualité de l’audit et leur incidence au Canada.

Avertissement

Les opinions et les points de vue exprimés dans cet article sont ceux de l’auteure et ne représentent pas nécessairement ceux de CPA Canada.